Financement des élèves en situation de handicap sensimoteur

Intervention de Mme Stéphanie Cortisse, Députée (MR), sur la proposition de décret du PS "visant à maintenir les moyens des pôles territoriaux chargés de soutenir la mise en œuvre des aménagements raisonnables et l'inclusion des élèves à besoins spécifiques" (doc. 112 (2024-2025))
Mme Cortisse rappelle que le décret du 17 juin 2021, portant création des pôles territoriaux chargés de soutenir les écoles de l'enseignement ordinaire dans la mise en œuvre des aménagements raisonnables et de l'intégration permanente totale, a été adopté au cours de la précédente mandature. Elle souligne qu'un arrêt de la Cour constitutionnelle du 1er juin 2023 a jugé discriminatoire le fait que les pôles territoriaux bénéficient d'un financement plus élevé pour les élèves en situation de handicap sensorimoteur, au détriment des élèves en situation de handicap intellectuel. La Cour a dès lors annulé les dispositions concernées du décret, tout en maintenant leurs effets jusqu'à la fin de l'année scolaire 2025-2026 afin de laisser au législateur le temps de légiférer à nouveau.
En réponse à des questions orales posées lors d'une précédente réunion de commission, la Ministre Glatigny a indiqué que l'évaluation de la réforme des pôles territoriaux est en cours. La déclaration de politique communautaire prévoit d'ailleurs que « le gouvernement évalue, dès la première année de la législature, le fonctionnement des quarante-huit pôles territoriaux afin de rendre le dispositif plus performant et plus efficient, en resserrant leurs missions au bénéfice de tous les élèves de l'enseignement ordinaire. ». À cet effet, l'administration mène un monitoring et une mission spécifique a été confiée au SGI pour observer le fonctionnement des pôles sur le terrain. L'objectif est de disposer d'un bilan clair sur l'efficacité réelle de ce dispositif, sa soutenabilité et son impact sur l'inclusion scolaire.
La députée souligne que la Ministre a précisé que le dispositif révisé ne pourra être soumis au Gouvernement qu'une fois achevées l'évaluation et la note d'orientation visant à l'amélioration de ce dispositif, soit d'ici la fin de l'année 2025. Elle insiste sur le fait que la circulaire 9545 ne prévoit pas la suppression de l'enveloppe de 9,1 millions d'euros, mais indique que certains moyens complémentaires ne seront plus reconduits à partir de la rentrée 2026-2027. Il ne s'agit donc pas d'une coupe budgétaire, mais de la non-reconduction de moyens jusque-là alloués à un public cible. Ces moyens complémentaires demeurent toutefois maintenus cette année. Elle observe que cette situation découle directement de l'arrêt de la Cour constitutionnelle qui a partiellement invalidé le cadre légal sur lequel repose cette allocation. Il ne s'agit donc pas d'une décision politique. Elle rappelle en d'autres termes que certains moyens complémentaires ne pourront plus être attribués sous leur forme actuelle durant l'année scolaire prochaine en raison d'une obligation juridique de revoir le mécanisme.
S'agissant plus particulièrement du financement des élèves sensorimoteurs, la députée relève que la Ministre a indiqué que plusieurs pistes sont actuellement examinées quant à l'avenir de cette enveloppe budgétaire. Elle précise que la Ministre souhaite qu'elle continue à bénéficier à ces élèves, contrairement au saupoudrage prévu par la proposition socialiste, mais dans le respect du principe d'égalité de traitement rappelé par la Cour. Elle mentionne cependant que la Fédération Wallonie-Bruxelles se trouve dans un contexte budgétaire contraint et que les pôles territoriaux ont connu un dérapage financier par rapport à la trajectoire initialement prévue. Elle indique qu'à ce titre, diverses pistes sont à l'étude concernant l'organisation et le fonctionnement des pôles.
Elle ajoute que ces réflexions s'inscrivent dans le cadre plus large de l'évaluation en cours, notamment par le monitoring et l'évaluation de l'ensemble des dispositifs. Les résultats de cette évaluation permettront d'alimenter les discussions à venir, avec pour objectif de rendre le système plus efficient pour l'ensemble des élèves à besoins spécifiques, de leur garantir un accompagnement adapté et de respecter les contraintes budgétaires.
La députée précise encore que la Cour a annulé par ricochet le financement complémentaire pour les élèves en intégration permanente totale, alors qu'il n'y avait pas de discrimination. Elle estime légitime et nécessaire de réintégrer ce financement afin de ne pas fragiliser leur accompagnement. Elle ajoute que le Gouvernement devrait intégrer ces ajustements techniques dans le cadre budgétaire de 2026, mais qu'il convient de ne pas élargir le dispositif avant la réalisation de l'évaluation prévue pour fin 2025, laquelle servira de base aux évolutions structurelles nécessaires.
En conclusion, elle annonce que son groupe votera contre la présente proposition de décret.
En réplique, Mme Cortisse intervient pour préciser à ses collègues que la Ministre rencontrera le surlendemain la Fédération francophone des sourds de Belgique, et qu'il est important que chacun soit informé que toutes les sensibilités seront entendues.
Elle rappelle ensuite que la proposition déposée par le groupe socialiste ne vise pas à trouver une nouvelle modalité de prise en charge pour les élèves à besoins spécifiques de type sensorimoteur, mais bien à réallouer l'enveloppe initialement prévue à cette fin – soit un montant de 9,1 millions d'euros – à l'ensemble des pôles, pour couvrir tous les élèves présentant des besoins spécifiques dans le cadre des aménagements raisonnables. Elle explique que c'est pour cette raison qu'elle a utilisé le terme de « saupoudrage » des moyens.
La députée revient sur le contexte et rappelle que le décret Pôles territoriaux de juin 2021, complété en juillet 2023, est un texte soumis par la Ministre socialiste Désir. Si des élections, changeant les majorités au pouvoir, ont depuis eu lieu, elle rappelle que ce texte a, en outre, fait l'objet de deux recours. Le premier a été introduit par le SeGEC, en raison d'un financement qui favorisait certains pôles relevant d'écoles organisées par WBE au détriment des autres réseaux. Le second a été introduit par l'ASBL Inclusion, contestant les dispositions relatives au financement complémentaire des pôles pour la prise en charge des élèves présentant des besoins spécifiques sensorimoteurs. Dans les deux cas, la Cour constitutionnelle a fait droit, dans son arrêt, aux deux recours et a annulé les dispositions incriminées.
S'adressant à la députée De Rodder, elle précise qu'elle n'a jamais affirmé que l'arrêt imposait une démarche particulière. Elle rappelle que la Cour s'est bornée à constater des discriminations et, comme à l'accoutumée, a laissé au législateur le soin de corriger ces dispositions. Elle insiste sur le fait que la Cour a octroyé un délai jusqu'à la fin de l'année scolaire 2025-2026 afin de permettre au législateur d'adopter de nouvelles mesures.
La députée souligne que le gouvernement travaille actuellement à cette correction, comme l'ont déjà rappelé les Engagés. Elle accuse le groupe socialiste de vouloir faire du « show » et du populisme avec sa proposition, et affirme que son groupe ne participera pas à ce jeu. Elle conclut en réaffirmant que, pour ces raisons, son groupe votera contre la proposition.