Financement des élèves en situation de handicap sensorimoteur

Intervention de Mme Stéphanie Cortisse, Députée (MR), sur la proposition de décret du PS "visant à maintenir les moyens des pôles territoriaux chargés de soutenir la mise en œuvre des aménagements raisonnables et l'inclusion des élèves à besoins spécifiques"
Mme Stéphanie Cortisse (MR). – Je voulais me joindre aux remerciements concernant les personnes qui nous écoutent depuis la tribune ou en ligne et qui peuvent nous suivre grâce à l'interprétation en langue des signes.
Chers collègues, permettez-moi de vous faire part de mon indignation. Je n'ai pas d'autres mots pour qualifier les publications du PS sur les réseaux sociaux à la suite de la réunion de la Commission de l'Éducation du 29 septembre dernier. Comment pouvez-vous mentir sur un sujet aussi sensible que les élèves porteurs de handicap? Pour avoir un moment de gloire sur les réseaux? Pour obtenir des voix? De tels mensonges ne sont plus un petit jeu de l'opposition. Ce n'est plus de bonne guerre, mais c'est indigne d'un parti démocratique qui, à présent, adopte exactement les mêmes méthodes que ses camarades de l'extrême gauche. Parce que oui, sous la précédente législature, il n'y avait que le PTB qui utilisait ce genre de méthode dans l'opposition. Mais à présent, c'est monnaie courante au PS aussi. Là, le mensonge atteint son paroxysme.
Non, les élèves en situation de handicap ne sont pas une variable d'ajustement. Non, la majorité ne supprime pas le budget de 9 millions d'euros dédié aux élèves présentant un handicap sensorimoteur.
La vérité a ses droits. De quoi parlons-nous ici?
D'un décret voté en 2021 durant le mandat de la Ministre socialiste Caroline Désir, le décret du 17 juin 2021 « portant création des pôles territoriaux chargés de soutenir les écoles de l'enseignement ordinaire dans la mise en œuvre des aménagements raisonnables et de l'intégration permanente totale ».
Il s'agit d'un décret que mon groupe a voté, mais qui était mal torché puisqu'il a fait l'objet de deux recours devant la Cour constitutionnelle, qui a annulé plusieurs de ses dispositions jugées comme discriminatoires. Le plus étonnant est que M. Dönmez parle bien de l'arrêt de la Cour constitutionnelle, mais n'en dit pas un mot sur les réseaux sociaux.
Rappelons que deux recours avaient été intentés: un premier introduit par le Secrétariat général de l'enseignement catholique (SeGEC) qui estimait que le réseau Wallonie-Bruxelles Enseignement (WBE) était avantagé par rapport aux autres réseaux. Le SeGEC a obtenu gain de cause.
Le second l'a été par l'ASBL Inclusion qui estimait – c'est bien son droit – qu'il y avait discrimination quand des moyens supplémentaires – un budget de 9 millions d'euros – sont destinés uniquement aux élèves porteurs d'un handicap sensorimoteur et pas aux autres types de handicap, comme le handicap intellectuel. Ce n'est pas nous qui le disons, mais l'ASBL Inclusion qui a intenté un recours. La Cour constitutionnelle lui a donné raison.
Quel culot de la part du PS – qui s'amuse présentement à me tourner le dos – de venir faire croire que c'est la majorité actuelle qui ne veut plus dédier cette enveloppe spécifique à ces élèves qui en ont besoin.
C'est bien la justice – la Cour constitutionnelle – qui dans l'arrêt 85/2023 du 1er juin 2023 a jugé que cette disposition décrétale – d'une ministre socialiste – violait les articles 10 et 11 de la Constitution. Ceux-ci garantissent le principe d'égalité et de non-discrimination. La Cour dit pour droit que la distinction entre les élèves en situation de handicap sensorimoteur et de handicap intellectuel ne peut être justifiée. Elle dit que le Législateur ne peut pas traiter différemment les élèves en fonction de leur situation de handicap. La Cour annule donc les dispositions concernées du décret. Elle en a toutefois maintenu les effets jusqu'à la fin de l'année scolaire 2025- 2026 pour laisser au Législateur le temps de prendre des nouvelles dispositions.
C'est ce que ce Gouvernement est en train de faire. Votre proposition, en définitive, ne vise qu'à court-circuiter le travail du Gouvernement pour faire le show sur les réseaux sociaux et dans cet hémicycle. Votre comportement est pitoyable.
La Ministre Glatigny, que j'ai d'ailleurs interrogée à ce sujet le 15 septembre dernier, l'a dit : une solution arrive. Plusieurs pistes étaient à l'étude pour déterminer comment affecter cette enveloppe légalement et la solution arrive. Je vois que Mme Glatigny acquiesce et me le confirme. Le but n'est pas de supprimer cette enveloppe budgétaire, et cela a toujours été dit.
La Ministre a également rappelé que l'évaluation de la réforme des pôles territoriaux est en cours. La Déclaration de politique communautaire (DPC) prévoit cette évaluation qui se trouve également dans ce décret du 17 juin 2021. Un monitoring est réalisé par l'administration. Une mission spécifique est également confiée au Service général de l'inspection (SGI) pour améliorer – et non supprimer – le fonctionnement des pôles. Il s'agit d'une réforme très récente, il convient donc de l'ajuster en gardant en ligne de mire l'intérêt des élèves.
Il est clair – la circulaire 9545 le mentionne d'ailleurs – que ces moyens complémentaires sont maintenus cette année. Toutefois, ils ne pourront plus être alloués dans leur forme actuelle l'année scolaire prochaine, l'arrêt de la Cour constitutionnelle l'oblige. Revoir le mécanisme est une obligation juridique.
Vous devez relire votre proposition de texte. Elle ne dédie plus ces moyens aux élèves à handicap – notamment les malentendants – puisque ce n'est pas possible. En effet, la Justice dit que nous ne pouvons malheureusement pas le faire. Nous avions également voté ce texte, mais c'est ainsi. Vous demandez de garder l'enveloppe et de répartir ces moyens par les pôles à tous les élèves en protocole d'aménagement raisonnable. Vous le reconnaissez vous-même.
Je vous ai dit – et aussi Mme Glatigny – que cette enveloppe est gardée. Il convient cependant de revoir la manière de l'affecter. Le Gouvernement procède à une analyse. Que puis-je dire de plus?
La Cour constitutionnelle a annulé, par ricochet, le financement complémentaire pour les élèves en intégration permanente totale. Il est légitime et nécessaire de continuer ce financement pour ne pas fragiliser l'accompagnement de ces élèves. Ces ajustements techniques seront intégrés par le Gouvernement.
Je le répète encore une fois, le budget dévolu à ce décret du 17 juillet 2023 est maintenu et le Gouvernement fera très prochainement une proposition de réaffectation. Comme l'a rappelé la Ministre Glatigny, nous souhaitons que, tout en respectant le principe d'égalité de traitement souligné par la Cour constitutionnelle, les élèves dont les besoins sont particulièrement importants, comme les élèves à besoins sensorimoteurs, puissent recevoir le soutien et l'accompagnement qui leur sont nécessaires et capitaux.
C'est pour les raisons que je viens d'évoquer, et uniquement pour ces raisons, que mon groupe votera contre cette proposition de décret.
Je crois que tout a été dit. Finalement, il n'y a pas eu de débat. Depuis le début, le groupe PS demande de maintenir les 9 millions d'euros et nous lui répétons qu'ils sont maintenus. Je ne sais pas ce que nous pouvons dire de plus.
Mon collègue n'a peut-être pas trouvé le compte rendu de la réunion du 15 septembre 2025 de la Commission de l'Éducation, dans lequel figure la réponse de la Ministre Glatigny aux trois questions orales de M. Dönmez, de Mme Linard et de moi-même: «Plusieurs pistes sont en cours d'analyse concernant l'avenir de cette enveloppe budgétaire, dont je souhaite qu'elle bénéficie encore à ces élèves, tout en respectant le principe d'égalité de traitement rappelé par la Cour».