Intervention sur le nouveau Décret Inscription dans l'enseignement secondaire

12/01/2022

Projet de décret abrogeant les articles 79/1 à 79/26 du décret du 24 juillet 1997 définissant les missions prioritaires de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre, et insérant des dispositions au sein du Code de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire relatives aux inscriptions en première année de l'enseignement secondaire (doc. 326 (2021-2022))

Mme Stéphanie Cortisse (MR).- Madame la Ministre, dès le début de cette mandature, votre gouvernement s'est engagé, dans sa Déclaration de politique communautaire (DPC), à abroger et remplacer les dispositions du décret du 24 juillet 1997 définissant les missions prioritaires de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre (décret «Missions») qui régissent actuellement les inscriptions en première secondaire «en vue de concilier les principes de libre choix des parents, d'adhésion au projet pédagogique et de mixité sociale au sein des écoles» et de «renforcer la transparence et l'équité du processus d'inscription, sa compréhension par les parents et la transparence administrative, et à mieux tenir compte de la réalité des bassins scolaires.» 

Je regrette que les nouvelles dispositions du projet de décret n'entrent pas en vigueur dès la prochaine période d'inscription qui débute en février prochain; certaines dispositions entreront effectivement en vigueur en 2023. Je ne vous en fais pas le reproche, Madame la Ministre. Il s'agit d'un dossier complexe qui a nécessité de nombreuses étapes et concertations dans un contexte de crise sanitaire. Je salue au contraire le temps que votre gouvernement a pris pour aboutir à un projet de décret qui est solide sur le plan juridique et qui permet de résoudre au mieux les difficultés de la version précédente. Il s'agit en effet d'un dossier d'importance capitale pour les écoles, les élèves et leurs parents. 

Si votre gouvernement a adopté ce projet de décret en dernière lecture en décembre 2021, vous aviez toutefois pu nous en dévoiler les éléments principaux lorsque je vous avais posé une question en commission parlementaire le 6 octobre 2020. À cette occasion, vous aviez présenté la note d'orientation que votre gouvernement venait d'approuver le 1er octobre 2020. Vous aviez également pu nous dévoiler beaucoup d'éléments sur ce dispositif lors de la réunion de commission du 23 mars 2021 alors que votre gouvernement venait d'adopter l'avant-projet de décret en première lecture le 18 mars 2021. 

Bien entendu, compte tenu du bref délai entre, d'une part, l'adoption de ce texte en commission en décembre dernier et en séance plénière de ce jour et, d'autre part, la prochaine période d'inscription qui débute en février 2022, vous avez dû informer au plus vite les acteurs concernés par les nouvelles dispositions qui entrent en vigueur dès cette année 2022 et qui faciliteront la procédure pour une majorité de familles. Vous avez émis une circulaire le 22 décembre dernier et je vous remercie d'avoir pris cette initiative. 

Toutefois, les dispositions un peu plus complexes, comme celles concernant le calcul de l'indice composite, entreront en vigueur en 2023 afin de laisser le temps aux acteurs de l'enseignement, mais aussi aux parents, d'être parfaitement informés et familiarisés avec le nouveau processus d'inscription. 

Les nouvelles dispositions viendront apporter des améliorations structurelles au décret du 3 avril 2009 relatif à la régulation des inscriptions des élèves dans le premier degré de l'enseignement secondaire (décret «Inscriptions»). Après le combat de longue haleine mené dans l'opposition contre les versions précédentes du décret «Inscriptions» depuis 2007, mon groupe se réjouit de la réforme de ce dispositif. 

Le groupe MR tient tout d'abord à saluer la simplification majeure pour les parents qui inscriront leurs enfants dans une école «présumée incomplète». Ils ne devront plus attendre des semaines pour une confirmation de l'inscription de leurs enfants, comme c'était le cas jusqu'à présent. Toutes les écoles concernées vont donc échapper au processus régulateur du décret «Inscriptions». Dès le dépôt du formulaire unique d'inscription (FUI), les parents recevront une confirmation automatique de l'inscription de leur enfant, sans plus aucune autre procédure, délais ou conditions. Cela permettra d'alléger fortement la procédure, de fluidifier le processus là où il n'y a pas de problèmes d'inscription, mais aussi de diminuer l'inquiétude d'une grande majorité des parents et des élèves. La suppression des mécanismes inutiles est un véritable changement de paradigme. Au total, entre 60 et 70 % des écoles secondaires en Fédération Wallonie-Bruxelles sont concernées par les nouvelles dispositions. 

Si la Commission de gouvernance des inscriptions (CoGI) estime qu'il existe un risque sérieux de déplacement des places disponibles dans une école présumée incomplète, elle pourra conseiller, par le biais d'un avis non contraignant, à une école de ne pas s'inscrire au processus d'école présumée incomplète. Il s'agit d'un cas de figure exceptionnel, où les inscriptions risquent d'être significativement supérieures au nombre de places disponibles. 

Par ailleurs, mon groupe salue l'amélioration de l'information, de la communication et de la transparence envers les parents, avec un suivi du processus en temps réel sur un site internet qui a fait peau neuve. En effet, le site a été complètement refondu pour permettre plusieurs objectifs: communiquer la procédure d'inscription; fournir un simulateur de calcul de l'indice composite et un exemple de FUI commenté; offrir un moteur de recherche des écoles secondaires; communiquer si un établissement était complet les cinq années précédentes. Ces dispositions permettront de mieux juger des éventuelles difficultés d'inscription dans une école. Le site fournira aussi un outil permettant aux parents et aux élèves de suivre l'évolution de la situation d'inscription en temps réel. Mon groupe a demandé avec insistance cette dernière mesure. 

La réforme des instances est pertinente, car elle permet de mieux coller à la réalité locale, avec la création des dix instances locales des inscriptions (ILI), chapeautées par la Commission de gouvernance des inscriptions (CoGI), qui remplacera la Commission interréseaux des inscriptions (CIRI). Je note que l'accent est mis sur la transparence des décisions, des avis, des propositions de la CoGI, qui devra rendre un rapport annuel et public portant sur l'exécution de ses missions. Cette disposition permettra d'éviter les difficultés qu'a connues la CIRI. La CoGI coordonnera, pilotera et évaluera le décret. Les ILI l'alimenteront sur la base des réalités de leur zone. Ces instances décentralisées permettront donc de mieux s'adapter aux réalités du terrain, mais aussi aux besoins des parents. 

La composition des ILI aura un champ plus large d'acteurs impliqués dans le processus: les fédérations de pouvoirs organisateurs; Wallonie-Bruxelles Enseignement (WBE); les associations de parents; les opérateurs de l'aide à la jeunesse, de l'accueil temps libre (ATL), de la lutte contre la pauvreté, de la diversité culturelle, de l'éducation permanente; les centres de jeunes. Elle impliquera également, grâce à un amendement déposé par la majorité et adopté à l'unanimité lors de notre réunion de commission, les organisations de jeunesse, dont celles ayant un dispositif particulier de soutien aux actions d'animation en collaboration avec les écoles. 

Une autre disposition importante, que nous voterons ce jour, mais qui entrera en vigueur en 2023, concerne le mode de calcul de l'indice composite. Madame la Ministre, je tiens à vous remercier de nous avoir rappelé, en réunion de commission, toutes les étapes du calcul. L'indice n'entrera en vigueur qu'en 2023, en raison de sa complexité. En effet, les acteurs sur le terrain doivent prendre le temps de se l'approprier. Il renforcera le libre choix des parents, qui est garanti par l'article 24 de la Constitution et auquel mon groupe tient particulièrement. Le nouveau système diminue significativement le poids du critère de la distance entre le domicile et l'école primaire, source de nombreuses difficultés à l'heure actuelle. 

Enfin, je salue la volonté de votre gouvernement de consacrer une mixité sociale à double sens, puisque 20,4 % des places sont réservés aux élèves à indice socioéconomique (ISE) faible et 10,2 % des places réservées aux élèves qui n'ont pas d'ISE faible. 

Un autre point important du décret est la clause de rendez-vous que vous avez fixée à 2026, en lien avec la mise en œuvre du nouveau tronc commun qui entrera en vigueur en première année secondaire cette année-là. Cette concordance de dates permettra d'évaluer le décret et d'y apporter éventuellement quelques modifications liées, notamment, aux missions des nouvelles instances créées. Je pense notamment à l'analyse, par exemple, du transfert de la compétence décisionnelle en première instance de la CoGI vers les ILI, avec un recours éventuel vers la CoGI. 

Enfin, parallèlement à la régulation de la demande, il est primordial de travailler sur l'offre d'enseignement, c'est-à-dire sur la création de places et l'amélioration de l'attractivité des écoles délaissées. Il est regrettable que certains élèves peinent à trouver une place, alors que de nombreux établissements manquent d'élèves. À cet égard, la DPC prévoit que «le gouvernement veillera à renforcer l'attractivité des établissements en difficulté (mise en place d'un nouveau projet pédagogique innovant, rénovation des infrastructures et de l'environnement de l'école, etc.), et à soutenir les écoles en situation de déficit d'image pour que les parents soient incités à y inscrire leur enfant.». Le ministre Daerden, chargé des Bâtiments scolaires, et vous-même êtes compétents pour ce faire. Le 16 décembre dernier, le gouvernement a adopté une note d'intention sur le manque de places en première année secondaire, prévisible pour la rentrée scolaire de septembre 2022-2023 à Bruxelles et sur les mesures à mettre en œuvre pour 2023-2024 et 2024-2025 en Fédération Wallonie-Bruxelles. Vous nous en avez déjà dévoilé les grandes lignes en décembre dernier. Le groupe MR continuera de suivre ce projet. Il est en effet essentiel que le nouveau dispositif d'inscription s'articule avec une politique proactive en vue de renforcer la création de places et d'accompagner les établissements qui sont en déficit d'attractivité, mais qui souvent comptent encore des places disponibles. Seuls ces chantiers permettront de répondre véritablement au libre choix des parents, entre des écoles de qualité, égale ou supérieure. 

En attendant le résultat de cette politique, le mécanisme de régulation des inscriptions est un palliatif temporaire destiné à éviter l'arbitraire sur la base de critères objectifs. Bien entendu, le groupe MR soutiendra ce projet de décret.