Question sur la formation professionnelle continue au niveau du CECP
Question orale de Mme Stéphanie Cortisse, Députée, à Mme Caroline Désir, Ministre de l'Éducation, à propos des formations professionnelles continues du niveau "réseau" du Conseil de l'enseignement des communes et des provinces (CECP)
Mme Stéphanie
Cortisse (MR). – À la suite de la réforme de la
formation professionnelle continue consacrée par le décret du 17 juin 2021
portant le livre 6 du Code de l'enseignement fondamental et de l'enseignement
secondaire et portant le titre relatif à la formation professionnelle continue
(FPC) des membres de l'équipe éducative des écoles et des membres du personnel
de l'équipe pluridisciplinaire des centres PMS, le Conseil de l'enseignement
des communes et des provinces (CECP) s'est vu confier, comme les autres
fédérations de pouvoirs organisateurs, l'organisation des formations du niveau
réseau, à côté de celles relevant de l'interréseaux.
Dans ce cadre, le
CECP a élaboré un programme général de formations pour une période de six ans,
allant de l'année scolaire 2023-2024 à l'année 2028-2029. Sur cette base, le
CECP a lancé un marché public afin de recruter les formateurs et constituer le
programme annuel de formation pour 2023-2024.
Les inscriptions
pour les formations répondant à des besoins collectifs ont été ouvertes du 15
juin au 14 juillet 2023. Il me revient du terrain que certains pouvoirs
organisateurs et directions n'ont matériellement pas eu le temps de rentrer une
demande de délégation d'organisation de formation collective durant cette
courte période d'inscription, ou ont tout simplement perdu de vue ce délai vu
la période chargée de fin d'année scolaire.
Madame la Ministre,
une souplesse pourrait-elle être apportée aux écoles et aux pouvoirs
organisateurs qui ont rentré une demande après le 14 juillet 2023 ? Je connais
un pouvoir organisateur qui ne l'a fait qu'en août, car il avait perdu de vue
ce délai.
Par ailleurs, le 26
septembre, le CECP a adressé aux pouvoirs organisateurs et aux écoles un
courriel expliquant que le budget qui sera alloué par le gouvernement, pour
l'année scolaire 2023-2024 et les années suivantes, ne lui permettra pas de
couvrir l'entièreté des besoins de formation. En effet, alors que le budget
global affecté au nouveau dispositif de FPC a augmenté de manière considérable,
la part de budget allouée au CECP n'a, quant à elle, augmenté que de manière
très marginale par rapport aux années scolaires précédentes régies par deux
décrets du 11 juillet 2002, le premier relatif portant le livre 6 du Code de
l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et portant le titre
relatif à la formation professionnelle continue des membres de l'équipe
éducative des écoles et des membres du personnel de l'équipe pluridisciplinaire
des centres PMS et le second relatif à l'Institut interréseaux de la formation
professionnelle continue (IFPC), et donc à la formation en cours de carrière
des membres du personnel de l'enseignement secondaire ordinaire, de
l'enseignement spécialisé et des centres PMS – alors que les demandes
d'inscription ont plus que doublées. Les honoraires des formateurs ont été
indexés, et les frais de déplacement des membres du personnel qui suivent les
cours doivent, à leur demande, être remboursés. Le CECP explique que les moyens
alloués désormais à l'enseignement fondamental ne représentent plus que 3,60 %
des moyens totaux généraux alors qu'avec les décrets du 11 juillet 2002, ce
même niveau bénéficiait de 38 % des moyens totaux généraux.
Aujourd'hui, le
CECP est contraint de ne pas pouvoir organiser toutes les formations répondant
à des besoins collectifs, notamment celles pour lesquelles les pouvoirs
organisateurs ont sollicité une délégation d'organisation, et de postposer
l'ouverture des inscriptions pour les formations répondant à des besoins
personnalisés. Cela met en difficulté le respect de leurs devoirs et droits
pour leurs enseignants en matière de FPC. Le gouvernement a le devoir de
s'assurer que le décret relatif à la FPC permette, dans les faits, au CECP de
déployer son offre de formation, comme c'est le cas pour les autres fédérations
de pouvoirs organisateurs et Wallonie-Bruxelles Enseignement (WBE).
Une réunion a été
prévue avec votre cabinet début octobre pour envisager la révision des
mécanismes de subventionnement. À la suite de cette réunion, quelles solutions
sont envisagées afin de résoudre ce problème budgétaire?
En outre,
concernant les formations répondant à des besoins collectifs pour lesquelles
les pouvoirs organisateurs ont sollicité une délégation d'organisation sur
fonds propres, il me revient que le décret du 17 juin 2021, dans son état
actuel, ne reconnaît pas ces formations comme de la FPC. Cela implique
l'impossibilité de suspendre les cours, la non-délivrance des attestations de
formation et la non-comptabilisation des journées de formation dans le cadre de
la capitalisation sur six ans.
Le CECP explique,
dans son courrier adressé le 26 septembre aux pouvoirs organisateurs et
directions, que vous lui avez accordé une dérogation pour reconnaître ces
formations. Une souplesse a été octroyée par rapport au financement et permet,
à titre exceptionnel, l'organisation de la FPC sur fonds propres avec
suspension des cours et la prise en compte de la formation professionnelle
continue dans la capitalisation. Toutefois, le CECP reste responsable de la
qualité et de la conformité de la formation déléguée à l'école vis-à-vis du
Code de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire.
Certaines écoles et
certains pouvoirs organisateurs regrettent un manque d'autonomie dans
l'organisation de la nouvelle FPC, alors que les réformes du Pacte pour un
enseignement d'excellence, dont les plans de pilotage et contrats d'objectifs
justifient la nécessité de mobiliser tous les enseignants d'un même pouvoir
organisateur autour d'une thématique de formation commune. Une telle mesure de
souplesse ne pourrait-elle pas devenir structurellement possible et être
décrétalement traduite?
Enfin, certaines
écoles et certains pouvoirs organisateurs s'interrogent sur la pertinence de
devoir solliciter trois devis pour une demande d'organisation d'une formation
collective. Selon eux, ce n'est souvent pas pertinent puisqu'un formateur n'est
pas l'autre et qu'il s'agit d'une demande intuitu personae, relative aux
qualités propres à un formateur et au contenu d'une formation. Bien
qu'inhérente aux marchés publics, cette règle ne pourrait-elle pas être
assouplie?
Mme Caroline
Désir, Ministre de l'Éducation. – Madame la Députée,
le CECP m'a effectivement interpellée sur les difficultés qu'il rencontrait
dans la mise en œuvre du décret du 17 juin 2021.
Vos questions me
donnent l'occasion de préciser que, contrairement à ce qui a pu être dit
jusqu'à présent, les difficultés financières ne découlent pas du fait que les
deux enveloppes budgétaires préexistantes sur le régime des anciens décrets du
11 juillet 2002 aient été globalisées pour ne former, avec les moyens nouveaux
du Pacte pour un enseignement d'excellence, qu'une seule et même enveloppe. Ces
difficultés découlent en réalité d'une erreur de l'administration dans la
répartition entre les fédérations de pouvoirs organisateurs et WBE des moyens
dévolus aux réseaux.
Je rappelle que le
décret du 17 juin 2021 dispose que ces moyens sont répartis entre les réseaux
en fonction des charges organiques, du capital période et du nombre total de
périodes professeurs (NTPP). Cependant, il semblerait que ces données aient été
exprimées dans des unités différentes. En l'occurrence, celles de
l'enseignement fondamental ainsi que celles des centres PMS en équivalent temps
plein (ETP) tandis que celles des enseignements secondaire et spécialisé
étaient exprimées en périodes. Ce qui a entrainé une sous-estimation des moyens
dévolus à l'enseignement fondamental et par conséquent au CECP. Aucune révision
des mécanismes de subventionnements actuels n'est donc à prévoir.
Une réunion a eu lieu hier entre mon cabinet, les fédérations de pouvoirs organisateurs et WBE. Nous travaillons en étroite collaboration avec leurs représentants, ainsi qu'avec les services de l'administration, pour que ce problème soit résolu très rapidement. Une solution a déjà été identifiée.
Pour l'organisation
d'une formation, le Code dispose, en son article 6.1.3-5 § 1er , que WBE ou
qu'une fédération de pouvoirs organisateurs délègue à un pouvoir organisateur,
tout en assumant la responsabilité et le financement de celle-ci. Selon les
principes généraux de délégation, le déléguant reste responsable des actes du
délégué. La responsabilité de WBE, ou de la fédération de pouvoirs
organisateurs, reste totale quant à la conformité avec le Code, la qualité et
l'aspect financier de cette organisation. Au vu des difficultés exposées par le
CECP – dont cette fédération de pouvoirs organisateurs n'est en rien
responsable –, j'ai proposé l'application d'une mesure de souplesse par rapport
à la responsabilité financière. De cette façon, les fédérations et WBE auront
pour cette seule année scolaire, la possibilité de déléguer aux pouvoirs
organisateurs ayant souhaité organiser des formations sur fonds propres, de
reconnaître celles-ci comme de la formation professionnelle continue et donc de
pouvoir suspendre les cours. Cependant, WBE, ou la fédération de pouvoirs
organisateurs, reste bien responsable de la qualité et de la conformité
vis-à-vis du Code de la formation déléguée à l'école: l'un de ces deux acteurs
devra procéder à la vérification d'une série d'éléments attestant qu'il s'agit
bien d'une formation au regard des critères définis par le Code, d'examiner si
ces formations sont en lien avec un des intitulés de leurs programmes et
rencontre les objectifs définis dans leurs programmes généraux de formation
approuvés par le gouvernement. Ils devront également intégrer cette formation
dans leur rapport annuel étant donné qu'elles font partie de leur offre. Quant
à prévoir la possibilité de rendre pérenne une telle mesure de souplesse, je
n'y suis pas favorable. Comme je viens de le préciser, cette décision n'est
valable que pour cette année scolaire.
Madame la Députée,
la date du 14 juillet à laquelle vous faites référence a été déterminée par le
CECP dans son organisation interne. Je tiens à rappeler la possibilité de
capitalisation des formations sur six années. Une telle approche permet ainsi
d'assurer une flexibilité et ne contraint pas nécessairement un membre du
personnel à se former collectivement chaque année à raison d'un tiers de
formations au niveau interréseaux et de deux tiers au niveau réseau.
Enfin, je ne peux
pas décider d'un assouplissement de l'obligation de demander trois devis pour
une demande d'organisation d'une formation collective, les pouvoirs
organisateurs de l'enseignement officiel et de l'enseignement libre étant
soumis à la loi du 17 juin 2016 sur les marchés publics relevant du niveau
fédéral.
Mme Stéphanie Cortisse (MR). – Madame la Ministre, je ne manquerai pas de transmettre vos réponses aux pouvoirs organisateurs et aux écoles qui m'ont interpellée à ce sujet.
Je note qu'il y a
eu une erreur de plusieurs millions d'euros de la part de l'administration du
budget dévolu à l'enseignement fondamental et au CECP. Ce problème va
heureusement être résolu dans les prochains jours. Je note également que vous
avez eu une réunion à ce sujet hier.
Pour ce qui
concerne la reconnaissance comme FPC d'une formation sur fonds propres par un
pouvoir organisateur, j'ai constaté, au contact des acteurs de terrain, que
certains pouvoirs organisateurs auraient souhaité pouvoir mobiliser uniquement
leurs écoles pour organiser une formation commune portant notamment par rapport
aux plans de pilotage et contrats d'objectifs. Ils disent regretter ce manque
d'autonomie que ne permet plus la nouvelle FPC. Je note qu'il y a une souplesse
pour cette année scolaire, mais regrette que cela ne puisse pas être pérennisé.
À mon sens, ce point devra être réévalué. Je vous questionnerai à nouveau pour
un suivi de ce dossier.