Question sur la fréquentation scolaire en maternelle

13/09/2022

Question orale de Mme Stéphanie Cortisse, Députée, à Mme Caroline Désir, Ministre de l'Éducation, intitulée «Fréquentation scolaire en maternelle»

Mme Stéphanie Cortisse (MR). - Madame la Ministre, je vous ai déjà interrogée à plusieurs reprises au sujet du renforcement nécessaire de la fréquentation scolaire en maternelle.

Le 12 octobre 2021, vous m'avez détaillé les inquiétantes statistiques concernant l'absentéisme en troisième année maternelle pour l'année 2020-2021. Elles montraient qu'il s'agit de l'année de l'enseignement fondamental qui a été la plus touchée par l'absentéisme scolaire injustifié.

Vous m'avez confirmé que «le Service du droit à l'instruction (SDI) peut fournir une série de données permettant le monitoring de l'impact de l'abaissement de l'obligation scolaire à cinq ans», mais que, «toutefois, ces missions se réalisent sur une année scolaire» et qu' «il semble donc opportun de refaire un bilan au 31 août de chaque année». La tendance à l'absentéisme en troisième année maternelle s'est-elle confirmée durant l'année scolaire 2021-2022? Pouvez-vous nous présenter les chiffres mis à jour le 31 août 2022 et les comparer à ceux de l'année scolaire 2020-2021?

Le 12 octobre 2021 toujours, vous m'avez précisé que «l'administration travaillait à l'élaboration d'un nouvel outil numérique» qui remplacera le format papier et qui «répondra davantage aux besoins de gestion et de suivi des présences des élèves», sans impliquer de surcharge administrative pour les directions. Pouvez-vous me présenter l'état d'avancement de cet outil numérique? Quelle sera concrètement la valeur ajoutée de cet outil dans le suivi des présences des élèves? Permettra-t-il enfin de connaître les taux de fréquentation des élèves inscrits en classe d'accueil et en première et deuxième années maternelles, hors obligation scolaire? Beaucoup d'élèves sont en effet inscrits hors obligation scolaire en première et deuxième années maternelles et ne fréquentent pas assidûment l'école.

Par ailleurs, vous avez ajouté qu'un projet ciblant la transition était mené dans le chantier n° 1 du Pacte pour un enseignement d'excellence, dans le but d'identifier les conditions grâce auxquelles il est possible d'améliorer le passage de l'école maternelle vers les classes primaires. Vous visiez à cet égard «la réalisation d'un cadastre des bonnes pratiques pour la rentrée de 2022». Ce cadastre a-t-il bien été réalisé? Quelles sont les grandes tendances qui en ressortent? Quelles mesures concrètes allez-vous prendre à cet égard?

Enfin, concernant la transition réussie entre la crèche et l'école maternelle, vous avez annoncé qu' «une analyse approfondie est également prévue à terme, pour étudier les conditions d'une transition réussie entre la crèche et les classes d'accueil et maternelles», ce travail devant évidemment se réaliser en bonne intelligence avec l'Office de la naissance et de l'enfance (ONE) et la ministre Bénédicte Linard. Pouvez-vous me préciser l'état d'avancement de ce chantier et me présenter un calendrier ainsi que votre méthode de travail?

Mme Caroline Désir, ministre de l'Éducation. - Madame la Députée, le taux d'absentéisme en troisième année maternelle pour l'année scolaire 2020-2021 était de 9,03 %. Pour l'année 2021-2022, le taux s'élève à 10,92 %. Cette augmentation s'observe également dans les autres années d'études. Le SDI a réalisé une analyse afin de vérifier si les élèves absents qui étaient inscrits en troisième année maternelle en 2020-2021 étaient toujours en situation d'absentéisme l'année scolaire suivante: il apparaît que la moitié d'entre eux doivent toujours faire l'objet d'une attention particulière.

Les travaux sont en cours pour créer une application consacrée à la gestion de la fréquentation scolaire. Le déploiement de cette application aura plusieurs objectifs distincts: premièrement, informatiser la prise des présences et la tenue des registres; deuxièmement, automatiser et systématiser la notification des absences injustifiées, sans accroître la charge de travail des équipes éducatives; troisièmement, s'assurer que chaque élève qui risque de décrocher est suivi efficacement. Certaines écoles disposent déjà d'une application leur permettant de gérer les aspects liés à la fréquentation. Il s'agira donc de concevoir une formule autonome pour que les établissements qui ne bénéficient pas d'un tel logiciel ou qui souhaitent passer par une application gratuite puissent aussi en profiter. Il conviendra également de prévoir un système de service en ligne pour récupérer des informations auprès des établissements qui souhaitent continuer à encoder dans leur application locale, à l'instar de ce qui a été fait pour l'application SIEL (SIgnalétique ELèves).

Enfin, je précise que ces outils n'ont pas pour objectif premier de calculer le taux de fréquentation en classe d'accueil et en première et deuxième années maternelles. Pour autant, ces fonctionnalités pourront être utilisées pour prendre les présences de tous les élèves indépendamment de leur classe.

Depuis le séminaire consacré au Pacte pour un enseignement d'excellence, organisé l'an dernier, les deux projets relatifs à l'entrée de l'école maternelle et au cadastre des bonnes pratiques ont été rééchelonnés. La nouvelle planification prévoit l'entrée en vigueur des mesures relatives à la charte et au guide pour l'entrée en maternelle lors de la rentrée de 2024. Le cadastre devrait faire son apparition en octobre 2025.

Mme Stéphanie Cortisse (MR). - Madame la Ministre, les chiffres que vous avez communiqués sont inquiétants. L'année dernière, le taux d'absentéisme en troisième année maternelle était déjà préoccupant. Or, il a encore augmenté cette année. Vous indiquez aussi que les élèves absents de manière injustifiée en troisième année maternelle ont été surveillés, et que le problème se pose encore pour la moitié d'entre eux en première année primaire. La vigilance est de mise. Vous devez remédier à ce problème et rappeler aux parents que l'âge de l'obligation scolaire a été abaissé à cinq ans.

Le groupe MR et d'autres estiment même qu'il faudrait abaisser l'âge de l'obligation scolaire à trois ans. Mon groupe a déposé une proposition de résolution au Sénat en ce sens. Bien que ce domaine soit une compétence de l'État fédéral, la Fédération Wallonie-Bruxelles peut agir sur la fréquentation scolaire. Faisons déjà en sorte que les parents respectent bien l'obligation scolaire dès que l'enfant a atteint l'âge de cinq ans et tentons de les convaincre d'inscrire leur dès la première ou la deuxième année maternelle.

Inscrire son enfant au plus tôt dans l'enseignement maternel augmente ses chances de réussite et contribue à réduire les inégalités sociales. La fréquentation régulière a de nombreux bénéfices pour le développement affectif, social, sensoriel, moteur et cognitif de l'enfant, mais aussi son développement langagier, en particulier lorsque le français n'est pas la langue parlée à la maison. La fréquentation scolaire favorise aussi l'enrichissement du vocabulaire et l'acquisition des codes de l'école et prépare mieux l'enfant à l'enseignement primaire et aux apprentissages de base. Elle contribue par ailleurs à réduire les risques d'échec, de décrochage scolaire et de redoublement. D'après la Fondation Roi Baudoin (FRB) et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le bénéfice est d'autant plus important pour les enfants issus de milieux défavorisés qui accumulent souvent plus de retard que les autres. Enfin, l'école maternelle est le lieu où se constitue et se structure le lien entre l'école et les parents, et cette relation de confiance doit s'établir au plus jeune âge de l'enfant.