Question sur la réforme de l'encadrement différencié

14/09/2021
Question de Mme Stéphanie Cortisse à Mme Caroline Désir, ministre de l'Éducation, intitulée «Évaluation des moyens accordés aux écoles à encadrement différencié»

Mme Stéphanie Cortisse (MR). - Madame la Ministre, je vous ai déjà interrogée à plusieurs reprises sur l'évaluation des moyens accordés aux écoles à encadrement différencié et je voudrais refaire le point sur ce dossier aujourd'hui. 

Lors des réunions de commission du 1er juin et du 12 juillet derniers, je sollicitais de pouvoir obtenir le rapport d'évaluation triennal déposé en mai dernier par la Commission de pilotage du système éducatif (Copi). Vous me précisiez que vous deviez d'abord analyser ce point avec l'administration pour déterminer s'il était possible de transmettre ce rapport aux parlementaires de notre commission. 

Sans citer de chiffres, vous précisiez que le constat général, pour tous les indicateurs de parcours et des évaluations externes, montrait que les résultats étaient systématiquement plus faibles pour les élèves de l'encadrement différencié par rapport à ceux de l'enseignement ordinaire, et ce, pour toutes les années observées. Vous ajoutiez que ces analyses ne permettaient pas d'identifier une amélioration sur les différents indicateurs de parcours des implantations après leur entrée dans le dispositif. 

Si je ne dispose toujours pas à l'heure actuelle de ce rapport d'évaluation, j'ai toutefois pu en prendre partiellement connaissance à la lecture d'un article du journal «Le Soir» du 28 juillet dernier, qui précisait avoir pu se le procurer. 

Selon ce rapport et les chiffres datant de 2019, alors que le taux de redoublement est resté relativement stable dans l'ensemble - 3 % dans l'enseignement primaire et 13 % dans l'enseignement secondaire -, je note qu'il a augmenté dans les écoles à encadrement différencié, passant, entre 2017 et 2019, de 5,1 % à 5,8 % dans l'enseignement primaire et de 17,5 % à 19,5 % dans l'enseignement secondaire. L'écart se creuse également au niveau du taux de retard scolaire: en secondaire, le taux d'élèves accusant un retard scolaire de deux ans et plus passe de 31,3 % à 40,5 % pour les écoles à encadrement différencié (+ 9,2 %) alors que pour l'ensemble des écoles, il passe de 18,1 % à 20,6 % (+ 2,5 %). 

Je ne sais pas si ces chiffres rapportés sont corrects ou pas; j'imagine cependant que «Le Soir» les a bien retranscrits. Je suis déçue de les obtenir par ce biais-là. C'est pour cette raison que je me permets d'insister de nouveau pour disposer de ce rapport. 

Au-delà d'une comparaison avec les autres écoles et de l'absence d'une amélioration des indicateurs au sein des écoles à encadrement différencié, le constat s'impose encore davantage, malheureusement: les indicateurs empirent d'année en année dans les écoles à encadrement différencié. 

Ces constats renforcent ma demande, que vous partagiez, de mener une évaluation qualitative poussée des conséquences de ce dispositif d'encadrement différencié en vue de son amélioration. Vous me répondiez en juillet dernier que les réflexions étaient encore en cours au sein de l'administration à ce sujet et que ce ne serait que lorsque cette évaluation d'impact aura pu être réalisée que nous pourrons déterminer les adaptations à introduire, le cas échéant, dans le dispositif de l'encadrement différencié. 

Pourriez-vous à présent nous adresser ce rapport d'évaluation du mois de mai 2021, mais aussi les rapports triennaux antérieurs sur lesquels je n'arrive pas à mettre la main? Où en sont les réflexions de l'administration par rapport à la manière d'évaluer qualitativement ce dispositif? Quels seront les indicateurs qualitatifs à y intégrer? Cette évolution dans les méthodes d'évaluation des moyens accordés ne nécessite-t-elle pas une modification décrétale? Dans l'affirmative, dispose-t-on déjà d'un calendrier? Compte tenu des chiffres qui interpellent et qui figurent dans ce rapport révélé par le journal «Le Soir», envisagez-vous de réformer à brève échéance ce dispositif pour le rendre efficient? Dans l'affirmative, selon quelle méthodologie et quel calendrier?

Mme Caroline Désir, ministre de l'Éducation. - Ma réponse sera malheureusement assez brève et je m'en excuse. Je veillerai à ce que le dernier rapport d'évaluation vous parvienne rapidement. 

Pour le reste, je ne dispose pas encore aujourd'hui des propositions de mon administration concernant les modalités de l'évaluation qualitative qui sera menée. Dès lors, vous comprendrez qu'il m'est impossible de répondre aux différentes questions très concrètes que vous me posez. 

Compte tenu de ceci, et du fait qu'il a été démontré que le rapport disponible ne constituait pas une évaluation valable de l'efficacité du dispositif de l'encadrement différencié, je ne peux évidemment pas envisager de réformer le système sur cette seule base. J'insiste sur ce point. 

Par ailleurs, pour faire écho aux propos du professeur Galand, nous savons que les moyens consacrés à l'encadrement différencié sont très faibles. Ils représentent un budget de quelques dizaines de millions d'euros qui vont aux 20 % des écoles les plus défavorisées du système scolaire, qui concentrent globalement énormément de difficultés et de pauvreté. Certains jugeront que c'est trop, mais je vous assure que sur le terrain, ces moyens sont absolument indispensables. 

Par ailleurs, je rappelle que la dernière réforme du décret date d'environ quatre ans. Elle est donc récente et indique que le système avait déjà été repensé. 

Je vous ferai donc parvenir le rapport d'évaluation et nous aurons l'occasion d'en débattre une nouvelle fois quand mon administration m'aura transmis les données nécessaires. 

Mme Stéphanie Cortisse (MR). - Outre le fait d'obtenir ce rapport de la Copi, j'insiste également pour recevoir les précédents rapports. Ils pourraient d'ailleurs se révéler intéressants pour l'ensemble des membres de notre commission. 

Je reviendrai vers vous, Madame la Ministre, pour le calendrier et la méthodologie. 

À mon sens, la situation interpelle, même si je ne remets pas en cause le fait qu'il existe des périodes supplémentaires. En revanche, sauf erreur de ma part, les écoles peuvent très bien décider d'engager, par exemple, un peintre à l'aide de ces moyens. Est-ce vraiment utile? Combien d'écoles engagent-elles un peintre plutôt qu'un éducateur? Je plaide, en conséquence, pour une évaluation qualitative. Par ailleurs, peut-être que l'évaluation quantitative dont vous disposez précise le nombre d'écoles qui utilisent ces moyens pour engager des ouvriers et du personnel pour rénover les établissements plutôt que du personnel éducatif? 

Vous comprenez mon insistance pour obtenir ledit rapport afin de le déterminer très exactement, tout en plaidant de nouveau pour une instauration rapide de cette évaluation qualitative qui permettrait de réformer, à brève échéance, ce dispositif qui montre toute son inefficacité lorsqu'on scrute les chiffres parus dans la presse. Je serai très attentive aux suites réservées à ce dossier.