Question sur la scolarisation des enfants en IPPJ

24/05/2022

Question écrite de Mme Stéphanie Cortisse, Députée (MR), à Mme Caroline Désir, Ministre de l'Éducation, à propos de la réinsertion scolaire des mineurs placés en IPPJ

Mme Stéphanie Cortisse (MR). - Madame la Ministre, en Commission du 7 juillet 2021, je vous ai interrogée par rapport à l'indispensable amélioration de la collaboration entre l'Administration Générale de l'Enseignement (AGE) et l'Administration Générale de l'Aide à la Jeunesse (AGAJ) en matière de réinsertion scolaire des jeunes placés en Institutions Publiques de Protection de la Jeunesse (IPPJ), tant au sein qu'au sortir de celles-ci ou encore lorsque la scolarité d'un mineur placé en IPPJ se réalise extra muros.

Je ne reviendrai pas ici sur les nombreuses remarques émises par la Cour des Comptes à cet égard dans son rapport du 25 février 2020 portant sur "la politique de placement des jeunes dans les IPPJ". Je les ai déjà longuement exposées en juillet dernier et je vous y renvoie.

J'insisterai par contre à nouveau sur le fait qu'à mon sens, la lutte contre le décrochage scolaire est une condition sine qua non de la réinsertion du jeune dans la société : souvent, un jeune qui commet un fait qualifié infraction est déjà en décrochage scolaire et sa désistance ne pourra avoir lieu que s'il raccroche à l'école.

Pour rappel, en Commission de l'Aide à la Jeunesse du 23 juin dernier, durant laquelle la Cour des Comptes a été auditionnée sur son rapport, votre collègue, la Ministre Valérie Glatigny, avait indiqué la mise sur pied d'une task force faisant le lien entre les secteurs de l'Aide à la Jeunesse et l'Enseignement afin d'analyser les besoins organisationnels et les synergies qui doivent permettre d'estimer plus objectivement la réelle insertion scolaire des jeunes ayant fait l'objet d'un placement en IPPJ.

Par ailleurs, votre collègue et vous-mêmes m'avez confirmé que la collaboration entre l'AGAJ et l'AGE était en développement dans le cadre du chantier n°13 du Pacte relatif à la mise en œuvre du plan de lutte contre le décrochage scolaire.

Vous m'avez précisé que si des collaborations existent déjà entre les deux administrations, "il est clair que les efforts doivent encore être poursuivis, voire intensifiés, pour que les jeunes puissent bénéficier d'une réinsertion sociale et scolaire satisfaisante" et que vous seriez "très attentive à la création de cette task force, ainsi qu'aux travaux du chantier n°13 du Pacte, et spécifiquement ceux portant sur le dispositif d'accrochage scolaire (DAS), pour qu'ils prennent en compte les problématiques très particulières des jeunes en IPPJ".

En Commission du 6 octobre 2020, votre collègue la Ministre Glatigny précisait que l'application du Décret du 21 novembre 2013 "organisant des politiques conjointes de l'enseignement obligatoire et de l'aide à la jeunesse en faveur du bien-être des jeunes à l'école, de l'accrochage scolaire, de la prévention de la violence et de l'accompagnement des démarches d'orientation" était en cours d'évaluation et qu'une journée d'étude était programmée avec vous en février 2021.

Elle précisait que les sujets suivants seraient notamment abordés : l'amélioration de l'accès des jeunes placés en IPPJ à un service d'accrochage scolaire, l'intensification des collaborations pour éviter l'exclusion trop rapide d'un jeune à la suite d'un problème de comportement ou encore la possibilité d'acquisition de certifications partielles durant le placement en IPPJ.

Madame la Ministre, mes questions à ce sujet sont les suivantes :

Une task force a-t-elle bien été mise en place ? Comment est-elle composée ? A-t-elle déjà rendu des conclusions ? Dans l'affirmative, quelles sont-elles ? Dans la négative, quand est-ce prévu ? Se penchera-t-elle sur chaque problématique spécifique soulevée par la Cour des Comptes dans son rapport du 25 février 2020 ?

Le Décret du 21 novembre 2013 précité a-t-il été évalué ? Qu'est-il ressorti de la journée d'étude qui devait se tenir en février 2021 à cet égard ?

Pouvez-vous me présenter l'état d'avancement du Chantier n°13 du Pacte et plus spécifiquement les aspects dudit chantier portant sur le dispositif d'accrochage scolaire (DAS) ? Qu'est-il concrètement mis en place dans ce cadre afin de prendre en considération les problématiques très particulières des jeunes placés en IPPJ en matière d'enseignement ?

Je vous remercie pour vos réponses.

Mme Caroline Désir, Ministre de l'Éducation. - Je vous confirme qu'en 2020, la Ministre de l'Aide à la Jeunesse s'est bien engagée à mettre en place une task-force visant à favoriser, de manière intersectorielle, la réinsertion scolaire des jeunes ayant fait l'objet d'une mesure de placement en IPPJ. Il me revient que les conséquences de la crise ont retardé la constitution de ce groupe de travail mais que la réflexion se poursuit auprès de ma collègue pour en organiser la tenue. Le cas échéant, je répondrai bien entendu favorablement à son invitation bien entendu.

Pour ce qui concerne le décret intersectoriel du 21 novembre 2013, son évaluation nous a été présentée en mars 2021 par une équipe de chercheurs de l'Université de Mons lors d'une réunion spécifiquement consacrée à ce sujet et à laquelle nous assistions, Valérie Glatigny et moi-même, ainsi que les deux Administrations générales. L'évaluation insiste sur la nécessité d'assurer la pérennité du décret intersectoriel en faisant largement la promotion de sa plus-value et de sa pertinence à l'égard du paysage institutionnel, notamment dans le cadre du Pacte pour un Enseignement d'Excellence.

Cette plus-value se concrétise par une meilleure connaissance intra et intersectorielle et des prises de contact facilitées et plus spontanées conduisant à des mises en projet plus rapides. Néanmoins, on observe également des freins, comme les différences de culture et de moyens alloués vis-à-vis de la concertation sont à noter entre les deux secteurs, des difficultés à faire percoler les enseignements issus des concertations vers le terrain et une implication variable des acteurs mandatés dans les plateformes zonales intersectorielles.

Enfin, quant au Chantier 13, les travaux centrés sur la lutte contre le décrochage scolaire visent l'ensemble des élèves en situation de décrochage. Les jeunes pris en charge en IPPJ, à l'instar de tous les autres élèves, pourront bénéficier des futurs dispositifs en discussion. A cet égard, je tiens à rappeler que ces travaux supposent l'articulation complexe de nombreux intervenants et de plusieurs secteurs, particulièrement celui de l'Aide à la Jeunesse avec lequel les collaborations sont nombreuses et riches.

Comme j'ai pu le déclarer à de nombreuses reprises, une note présentant le schéma global de lutte contre le décrochage est attendue avant les vacances parlementaires.