Question sur la valorisation des langues régionales endogènes en FWB

19/09/2023

Question orale de Mme Stéphanie Cortisse, Députée, à Mme Bénédicte Linard, Ministre de la Culture, à propos du suivi de la valorisation des langues régionales endogènes en Fédération Wallonie-Bruxelles

Mme Stéphanie Cortisse (MR). – Madame la Ministre, je vous ai déjà interrogée à plusieurs reprises concernant la valorisation des langues régionales endogènes en Fédération Wallonie-Bruxelles.

Pour rappel, le Conseil de la langue française, des langues régionales endogènes et des politiques linguistiques a mené une enquête sur la vitalité de ces langues. Au mois d'avril dernier, alors que la publication du rapport détaillé était attendue pour le premier trimestre 2023, vous me précisiez que le Service de la coordination statistique et de la recherche avait achevé les phases de nettoyage et de croisement des données brutes; que celles-ci furent récoltées par un institut de sondage auprès de 5 000 répondants et que l'interprétation et la présentation des résultats – réalisées avec l'appui du Service des langues régionales endogènes (SLRE) et d'experts réunis au sein d'un comité d'accompagnement – étaient toujours en cours. La publication d'un premier rapport de recherche était donc désormais prévue pour la fin du mois de juin, tandis que les données complètes devaient être publiées et présentées ce mois de septembre. Cette enquête a pour principale mission d'établir un état des lieux objectif de la vitalité des langues régionales endogènes en Fédération Wallonie-Bruxelles. Dans un second temps, l'analyse des résultats doit permettre d'identifier et de planifier des mesures destinées à renforcer cette vitalité.

L'analyse de cette enquête est-elle à présent finalisée? Pourriez-vous en présenter les conclusions et nous communiquer la copie du rapport complet? Avez-vous pu, sur la base de cette enquête, identifier et planifier des mesures en vue de renforcer la vitalité des langues régionales endogènes en Fédération Wallonie-Bruxelles? Quelles sont ces mesures? De quelle manière et selon quel calendrier allez-vous les concrétiser?

Par ailleurs, qu'en est-il de la valorisation des langues régionales endogènes en milieu scolaire? En 2020, le Service de recherche sur le wallon de la Haute École de la ville de Liège (HEL) et le SLRE de la Fédération Wallonie-Bruxelles ont mené une enquête sur les langues régionales à l'école. Parmi les 110 enseignants ayant répondu à cette enquête, 23 ont animé moins d'une fois par mois dans leurs classes des activités en lien avec les langues régionales; 11 au moins une fois par semaine et 4 au moins une fois par mois. Les 72 autres répondants ne l'ont jamais fait, mais aimeraient le faire. Selon le rapport, cette question montre une marge de progression possible dans l'espace occupé dans les classes par les langues régionales. À la question «avez-vous l'impression de manquer de ressources pour aborder ces thématiques?», 64 enseignants ont répondu oui; 18 non. Par ailleurs, il ressort de l'enquête que les enseignants ont très peu recours aux centres de documentation spécialisés. Des conclusions provisoires de cette enquête, il ressort que les langues régionales sont surtout évoquées en troisième, cinquième et sixième années primaires. Le plus souvent, il s'agit de préparer une récitation, une pièce de théâtre ou une chanson dans le but de présenter un spectacle. Les enseignants estiment manquer souvent de ressources pour travailler ces matières, mais semblent méconnaître les centres susceptibles de leur venir en aide. Les types de ressources qu'ils aimeraient le plus utiliser sont des séquences prêtes à l'emploi, des jeux et des ressources multimédias.

Deux recommandations ressortent de ce rapport. La première est qu'une action simple serait de mieux communiquer sur l'existence de centres de ressources. La seconde concerne la conception d'outils. Le travail du service de recherche sur le wallon de la HEL se concentrera donc sur les attentes des enseignants et non, comme initialement prévu, sur des ressources pour un public préscolaire. L'enquête permet donc de mieux rencontrer les attentes des acteurs de terrain.

J'ai interrogé la Ministre Désir à ce sujet lors de la réunion du 4 juillet dernier de la Commission de l'Éducation. À cette occasion, j'ai insisté sur le fait qu'il s'agit non pas d'un cours de langue de wallon, mais de la sauvegarde de notre patrimoine culturel en dispensant aux élèves quelques notions, en les informant et en les sensibilisant à l'existence des différents dialectes régionaux. Cela pourrait se faire notamment dans le cadre du cours d'éveil aux langues ou encore du parcours d'éducation culturelle et artistique (PECA). La Ministre m'a répondu que, pour ce qui relève de l'enseignement obligatoire, la plateforme e-classe pourrait très utilement accueillir de telles ressources. Elle reconnaît que le PECA se prête à soutenir ce type d'activités et que le référentiel du nouveau cours d'éveil aux langues constitue une autre porte d'entrée qui pourrait être utilement exploitée. Mme Désir a encore ajouté que toutes ces pistes pourraient être approfondies, mais qu'elle vous laissait le soin, en votre qualité de Ministre de la Culture, d'apprécier leur pertinence et d'engager, le cas échéant, les collaborations nécessaires avec elle et avec l'Administration générale de l'enseignement (AGE).

Madame la Ministre, quelles sont les conclusions définitives de cette enquête sur la valorisation des langues régionales endogènes en milieu scolaire? Quelles suites y avez-vous réservées? Comment le Gouvernement concrétisera-t-il les recommandations? Entamerez-vous une collaboration à ce sujet avec l'AGE et avec la Ministre Désir pour rappeler aux enseignants l'existence des centres de ressources en langues régionales endogènes; pour faire figurer ces derniers sur la plateforme e-classe, ainsi que pour développer et mettre à la disposition des acteurs de terrain de nouveaux outils pédagogiques dans ce domaine?

Mme Bénédicte Linard, Ministre de la Culture. – Madame la Députée, la Direction de la recherche du Secrétariat général publiera le rapport de l'enquête en question le jeudi 28 septembre 2023. La version complète du rapport sera alors rendue mise à la disposition du public. Les résultats de l'enquête seront présentés aux membres de l'instance d'avis compétente, c'est-à-dire le Conseil de la langue française, des langues régionales endogènes et des politiques linguistiques, lors de sa séance plénière du lundi 9 octobre. Le Conseil sera invité à émettre un avis et des recommandations sur la base de ces données.

Le Service de recherche sur le wallon de la HEL n'a pas transmis de conclusions supplémentaires. Sans préjuger de l'avis de ce partenaire et compte tenu des limitations dues à l'échantillon, l'AGC émet des réserves quant à la possibilité de poursuivre l'exploitation de ces données. En ce qui concerne la communication aux enseignants vis-à-vis de l'existence des centres de ressources en langues régionales endogènes, leur présence sur la plateforme e-classe et le développement de nouveaux outils pédagogiques à cet égard, il est à noter que des ressources pédagogiques – dont la conception a été soutenue par la Fédération Wallonie-Bruxelles en 2019 et 2020 – figurent déjà sur la plateforme e-classe sur la base d'une initiative du SLRE. Quant à la nécessité de sensibiliser les enseignants à ce sujet, le Service général des lettres et du livre (SGLL) a prévu d'inclure une publicité spécifique dans le kit adressé aux écoles dans le cadre de l'édition 2023 de l'opération «La Fureur de lire». Cette publicité sera centrée sur le programme intitulé «Langues et cultures régionales en classe», désormais reconnu dans le cadre du PECA, ainsi que sur son adéquation aux objectifs fixés par la brochure «Éveil aux langues». Pour le développement de nouveaux outils, les opérateurs du secteur ont la possibilité de solliciter des soutiens à l'édition. Deux demandes de ce type ont reçu un avis favorable de la Commission des écritures et du livre en 2022. Un cahier destiné à faciliter l'exploitation en classe de l'une des plaquettes «Fureur de lire» dédiées aux langues régionales endogènes est en cours d'élaboration et devrait paraître d'ici le mois de décembre 2023.

Mme Stéphanie Cortisse (MR). – Madame la Ministre, votre réponse me laisse perplexe. En effet, la Ministre Désir affirme que la plateforme ne présente pas encore d'informations sur le sujet et propose de collaborer avec vous à ce sujet. Vous me répondez quant à vous que les informations y figurent déjà. Je vous crois bien évidemment, mais cela signifie que cette plateforme est méconnue. Dès lors, ne serait-il pas utile d'envoyer une circulaire aux écoles?

Selon la Ministre Désir, cette démarche vous incombe. Il serait peut-être judicieux d'écrire à l'AGE et à la Ministre Désir pour les inviter à envoyer une circulaire aux écoles et leur rappeler ainsi l'existence de ces ressources qui figurent sur la plateforme e-classe. Les enseignants peuvent y avoir recours dans le cadre du PECA et du cours d'éveil aux langues. Ce serait une bonne chose.

À ce sujet, j'aimerais évoquer la plateforme Apprentis Citoyens. Celle-ci existe depuis longtemps et accueille des débats politiques organisés par des organisations de jeunesse (OJ) politiques francophones. À ma demande, la Ministre Désir a rappelé l'existence de cette plateforme dans une circulaire parue hier. Il convient parfois de rappeler certaines informations aux écoles, car celles-ci reçoivent beaucoup de circulaires qu'elles ne lisent pas forcément. En l'occurrence, cela rappellerait aux enseignants l'existence d'activités destinées à valoriser les langues régionales endogènes. Je ne manquerai pas de suivre l'évolution de ce dossier avec vous et la Ministre Désir.