Question sur le manque d'attractivité de certaines écoles

20/10/2020

Question de Mme Stéphanie Cortisse à Mme Caroline Désir, Ministre de l'Éducation, sur l'amélioration de l'attractivité de certaines écoles.

Mme Stéphanie Cortisse (MR).- Lors de notre précédente commission, alors que je vous interrogeais à propos de la réforme du décret du 3 avril 2009 relatif à la régulation des inscriptions des élèves dans le premier degré de l'enseignement secondaire (décret «Inscriptions») dans l'enseignement secondaire, vous en avez profité pour rappeler qu'il convient de continuer, en parallèle, à travailler à la création de nouvelles places dans les écoles, ce qui relève des compétences de votre collègue chargé des bâtiments scolaires, M. Frédéric Daerden, mais aussi à l'amélioration de l'attractivité de certaines écoles. Vous évoquiez notamment la problématique des «écoles sans élèves».

La Déclaration de politique communautaire (DPC) prévoit à cet égard que «le gouvernement veillera à renforcer l'attractivité des établissements en difficulté (mise en place d'un nouveau projet pédagogique innovant, rénovation des infrastructures et de l'environnement de l'école, etc.) et à soutenir les écoles en situation de déficit d'image afin que les parents soient incités à y inscrire leur enfant».

Les écoles sont en effet souvent cataloguées et enfermées dans une logique de surenchère pour les unes, et de laissées pour compte pour les autres. Le décret «Inscriptions» a eu pour conséquence de révéler qu'il existe des établissements que les parents délaissent catégoriquement. Ces écoles qui manquent d'attractivité sont toujours les mêmes depuis des années.

L'administration de l'enseignement estime l'évolution de la population scolaire de 5 % en moyenne à l'horizon 2029‑2030. Les prochaines variations les plus importantes de population scolaire sont prévues en 2021‑2022 pour le secondaire, et en 2022‑2023 pour le maternel. Compte tenu déjà de la situation actuelle, ces prévisions sont fortement inquiétantes en termes de places dans les écoles, surtout à Bruxelles.

D'après la Commission interréseaux des inscriptions (CIRI), il existe environ 16 000 places libres en Fédération Wallonie-Bruxelles, même si je n'ai pas obtenu de chiffres plus récents. À noter que ces dernières sont essentiellement situées en Wallonie et ne peuvent donc pas aider à résorber le manque de places à Bruxelles. En outre, il s'agit principalement de places dans des établissements qui ne sont pas très recherchés par les parents, du fait de la réputation de l'école, qui ne se trouvent pas dans une zone à forte tension démographique ou qui n'organisent que l'enseignement technique et professionnel à l'issue du premier degré du secondaire.

Vu le temps nécessaire à la création d'écoles, j'estime qu'il est fondamental de travailler sur l'amélioration de l'attractivité de l'offre et non seulement sur la régulation de la demande. Mon groupe le sollicite depuis plusieurs législatures. Il faut donc examiner dans quelles mesures les établissements précités pourraient être «réhabilités» afin de profiter pleinement de leurs capacités d'accueil.

Où en sont vos travaux concernant l'objectif de la DPC qui est de renforcer l'attractivité des établissements en difficulté? Quels critères permettent d'estimer qu'un établissement manque d'attractivité? Combien d'écoles souffrent d'un tel manque?

Cette problématique fait-elle partie intégrante d'un des chantiers du Pacte pour un enseignement d'excellence? A-t-elle déjà été débattue par votre gouvernement? Dans l'affirmative, des pistes de solution sont-elles déjà sur la table? Dans l'affirmative, lesquelles? Quelle méthodologie de travail comptez-vous employer? Quel sera votre calendrier?

Mme Caroline Désir, Ministre de l'Éducation.- L'attractivité des établissements scolaires est une problématique complexe, au croisement de plusieurs niveaux de responsabilité et de pouvoir.

Il n'existe pas de définition formelle de l'attractivité, mais le terme est habituellement utilisé pour désigner des écoles qui ne reçoivent que peu ou pas de formulaires uniques d'inscription dans le cadre de l'application du décret «Inscriptions». Il s'agit d'une vision partielle de la réalité d'un établissement puisqu'il faut également juger de la fréquentation des élèves dans ses autres degrés d'enseignement. La réalité montre que, parfois, les écoles qui recueillent peu de formulaires d'inscription peuvent néanmoins être fort sollicitées pour les autres degrés.

Les balises au niveau des normes de fréquentation et de maintien constituent de bons indicateurs de situations problématiques. L'attractivité est donc essentiellement un concept à utiliser par rapport au décret «Inscriptions» et aux écoles qui offrent des places, mais dans lesquelles les parents ne veulent pas y inscrire leurs enfants.

En l'absence de critère précis, il semble que 15% des établissements bruxellois pourraient améliorer leur attractivité. Les proportions de vacances de places disponibles évoluent quant à elles dans une fourchette variant de 10 à 75%.

Une action utile serait d'intervenir sur la mise en place d'un nouveau projet pédagogique ou sur l'environnement de l'école, mais elle ne relève pas directement de mes compétences de pouvoir régulateur. L'initiative en revient essentiellement aux pouvoirs organisateurs. C'est d'autant plus vrai depuis l'autonomisation de Wallonie-Bruxelles Enseignement (WBE) en tant que pouvoir organisateur de l'enseignement organisé par la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Le gouvernement offre toutefois un soutien essentiel et considérable, notamment pour les bâtiments scolaires, avec les différents fonds prévus pour soutenir les travaux. Je pense au programme prioritaire de travaux (PPT) ou encore à l'appel à projets pour la création de nouvelles places dans les zones en tension démographique.

Il ne faut pas oublier non plus le niveau régional qui peut avoir un impact sur l'attrait d'un établissement, notamment avec la politique pour la mobilité. Je pense aussi à ce qui existe au niveau de la Région de Bruxelles-Capitale qui a développé les contrats-écoles pour travailler sur l'environnement physique d'un établissement.

Il est toutefois clair que le Pacte pour un enseignement d'excellence offre une solution systémique pour briser les hiérarchies et les logiques de relégation entre établissements. La réforme du tronc commun, notamment parce qu'elle invite à la mise en place d'un véritable continuum pédagogique, devrait impliquer une redéfinition du paysage de l'offre scolaire sous la forme d'écoles du tronc commun, et/ou de profondes synergies entre écoles fondamentales et secondaires. L'impact sur l'inscription en première secondaire pourrait être important.

De plus, un chantier entièrement consacré aux bâtiments scolaires travaille au recensement d'outils et de données, voire à leur création, afin de disposer d'outils performants de gestion des infrastructures scolaires, quel que soit le réseau. Dans la note d'orientation, le gouvernement a réaffirmé l'importance et la priorité de ces perspectives.

Si les chantiers du Pacte avancent en fonction de leur propre calendrier, celui de la réforme du décret «Inscriptions» s'y inscrit évidemment de façon symbiotique.

Mme Stéphanie Cortisse (MR).- Je vous remercie pour votre réponse, Madame la Ministre. Il est nécessaire que les établissements en déficit d'attractivité bénéficient de mesures et d'ajustements afin d'inciter plus de parents à y inscrire leurs enfants. Je regrette qu'il n'existe pas d'outils pour le faire. Vous vous basez sur certains critères, mais ils manquent de précisions. C'est pourtant la base et il faudrait y travailler en priorité.

Il n'existe pas encore de stratégie très claire à ce sujet. Selon la volonté déclarée dans la DPC que vous réitérez aujourd'hui, il faut aller au-delà de la création de nouvelles places, ce qui relève des compétences du Ministre Daerden.

L'adoption du plan de pilotage et de contrats d'objectifs pourra remédier à la situation puisque les établissements en déficit d'image pourront modifier leur projet pédagogique et attirer plus d'élèves. Le pouvoir régulateur pourra bien sûr contrôler le contrat d'objectifs.

La répartition de la population scolaire est quant à elle frappante. Certaines écoles manquent déjà de places et il serait regrettable de ne pas valoriser les établissements qui disposent de capacités d'accueil importantes.

Je ne manquerai pas de suivre le dossier avec attention.