Question sur le quatrième dérapage d'Ecolo J en deux ans
Question orale de Mme Stéphanie Cortisse, Députée (MR), à Mme Valérie Glatigny, Ministre de l'Enseignement supérieur, à propos du quatrième dérapage d'écolo J en deux ans
Mme Stéphanie Cortisse (MR). - Madame la Ministre, ce n'est pas la première fois que je vous interroge sur l'attitude de l'organisation de jeunesse écolo j, qui est aux antipodes de sa mission consistant à former des citoyens responsables, actifs, critiques et solidaires (CRACS). Elle perçoit d'ailleurs une subvention de la Fédération Wallonie-Bruxelles pour remplir cette mission.
Pour rappel, la première polémique impliquant écolo j est survenue en 2020, lorsque l'organisation a distribué une brochure invitant à assommer des policiers et des patrons avec une pancarte pour obtenir une augmentation salariale.
La deuxième polémique date de la fin de l'année 2021: à l'occasion d'une manifestation contre les violences sexuelles, écolo j a demandé aux hommes cisgenres de se tenir à l'arrière du cortège.
Au mois de mars 2022, écolo j a publié sur les réseaux sociaux des stickers prétendant que «la police assassine».
La quatrième et dernière polémique vise la publication par écolo j d'une offre d'emploi liée à sa charte anti-discriminations et d'exemplarité. L'organisation s'y engage à «ne pas accepter d'avoir une équipe salariée uniforme au niveau du genre/de l'origine ethnique/de l'orientation sexuelle» et précise que les personnes racisées, les personnes issues des minorités sexuelles et de genre, les personnes porteuses d'un handicap, ainsi que les personnes ayant un cheminement atypique sont encouragées à postuler à cette offre. «En cas d'appréciation égale sur les compétences et l'adéquation à un poste, la préférence sera donnée aux candidat·es issues de groupes minorisés.»
À chaque fois, écolo j a présenté une bonne excuse pour s'expliquer. Ainsi, l'invitation à frapper des policiers et des patrons avec une pancarte n'était qu'une activité ludique. La discrimination à l'égard des hommes non transgenres lors d'une manifestation était justifiée parce qu'il s'agissait d'une demande des organisatrices qu'il fallait apparemment relayer sans se poser de questions. Lorsqu'écolo j a prétendu que «la police assassine», il s'agissait d'une «erreur de formulation». Quelle sera l'excuse d'écolo j cette fois-ci?
Sous le prétexte fallacieux de promouvoir l'égalité des genres, écolo j discrimine notamment les personnes de genre masculin. Or, l'égalité des genres, c'est pour tout le monde!
Madame la Ministre, vous avez mandaté votre administration pour investiguer au sujet des trois précédentes polémiques. Où en sont ces investigations? Avez-vous pris connaissance du nouveau dérapage d'écolo j? Quelles actions comptez-vous entreprendre à cet égard?
Mme Valérie Glatigny, Ministre de l'Enseignement supérieur. - Madame la Députée, avant de répondre à vos questions, il est important de rappeler la raison d'être des organisations de jeunesse, en particulier des mouvements thématiques. Les organisations de jeunesse poursuivent plusieurs finalités détaillées à l'article 4 du décret du 26 mars 2009 fixant les conditions d'agrément et d'octroi de subventions aux organisations de jeunesse: «favoriser le développement d'une citoyenneté responsable, active, critique et solidaire chez les jeunes par une prise de conscience et une connaissance des réalités de la société, des attitudes de responsabilité et de participation active à la vie sociale, économique, culturelle et politique ainsi que la mise en œuvre et la promotion d'activités socioculturelles et d'Éducation permanente»; «favoriser la rencontre et l'échange entre les individus, les groupes sociaux et les cultures, dans toute leur diversité»; «proposer aux jeunes des espaces qui soient des lieux d'émancipation, d'expérimentation, d'expression, d'information et de réflexion, en règle éloignés de tout but de lucre et favorisant l'éducation active par les pairs».
En plus de poursuivre ces finalités comme le reste des organisations de jeunesse reconnues dans le cadre de ce décret, les mouvements thématiques doivent également respecter les conditions particulières liées à leur catégorie. Par exemple, ils doivent «sensibiliser et interpeller la société par des activités d'une part, des réflexions ou analyses d'autre part, orientées autour d'une ou de plusieurs thématiques identifiables, lesquelles peuvent relever d'un champ particulier ou d'un champ sociétal global».
Ces précisions étant faites, venons-en aux faits que vous dénoncez.
Tout d'abord, j'ai immédiatement réagi à la publication de la brochure incriminée en adressant un courrier à écolo j, lequel indique notamment ceci: «Le jeu que vous proposez n'invite ni au débat ni à la discussion. Au contraire, il banalise des comportements violents et ceci est totalement inacceptable.»
Ensuite, écolo j n'a pas exclu les hommes de la marche contre les violences sexuelles: il s'agissait d'une demande de mise en retrait expressément faite par des victimes de violences sexuelles. J'ai toutefois rappelé que je resterais vigilante afin que les activités des organisations de jeunesse en Fédération Wallonie-Bruxelles soient aussi inclusives que possible, en particulier dans le domaine de la lutte contre les violences sexuelles, qui est un combat que nous devons mener tous ensemble, hommes et femmes.
En ce qui concerne les stickers, j'ai demandé à mon administration de les analyser afin de vérifier le respect des prescrits légaux. J'attends les résultats de cette analyse.
J'ai également sollicité une analyse de mon administration à l'égard de l'offre d'emploi que vous avez évoquée, toujours afin de vérifier que les prescrits légaux ont été respectés, notamment en termes de non-discrimination.
J'attends également les résultats de cette analyse avant de réagir. Je comprends que les actions d'écolo j de ces deux dernières années vous agacent. En tant que libérale, je ne pourrai jamais cautionner l'incitation à la violence, la discrimination ou les pratiques excluant l'une ou l'autre catégorie de la population. Je sais que cette position est partagée par l'ensemble des partis démocratiques.
Ces éléments m'amènent à m'interroger de manière plus globale sur la gouvernance du secteur de la jeunesse. Dans l'intérêt des jeunes, il me semble nécessaire d'amorcer une réflexion sur les balises qui permettraient d'éviter ce genre d'incidents à l'avenir. J'ai sollicité mon administration afin qu'elle me transmette des propositions en ce sens. J'aimerais que le secteur de la jeunesse en fasse autant. Pour terminer, je rappellerai qu'en Flandre et en Communauté germanophone, les mouvements de jeunesse politiques sont financés par les partis politiques eux-mêmes.
Mme Stéphanie Cortisse (MR). - Madame la Ministre, je vous remercie pour ces pistes de réflexion, que je ne manquerai pas de suivre. Je sais que vous êtes attentive à ce que les organisations de jeunesse respectent bien les prescrits légaux. Vous n'avez d'ailleurs pas manqué, à chaque fois, de dénoncer les dérapages d'écolo j. Je vous remercie d'avoir soumis ces dossiers à l'administration.
Il est clair que mon groupe ne partage pas la vision de société d'écolo j, qui consiste à catégoriser les citoyens sur la base de leur genre, de leur origine, etc. Toutefois, la question qui importe ici est le respect des décrets; il s'agit donc de savoir si les actions d'écolo j correspondent à ce qui est considéré comme la formation de CRACS.
En me replongeant dans la charte anti-discrimination d'écolo j après le dépôt de ma question, deux nouveaux éléments ont attiré mon attention et mériteraient d'être soumis à votre administration.
Premièrement, le point 71 de cette charte explique que les mécanismes systémiques, en ce compris les socialisations différentes, rendent les quotas nécessaires pour espérer aboutir à cet objectif. Ainsi, le mécanisme «50+» signifie qu'au moins la moitié des personnes représentées dans les mandats concernés doivent être des femmes cisgenres ou des personnes transgenres ou intersexes. La suite du texte m'inquiète davantage, car il y est dit que cela n'exclut pas la possibilité qu'aucun homme cisgenre ne soit représenté, ce qui constitue une discrimination. Alors qu'il est question de quotas pour des raisons de représentativité, la possibilité qu'il n'y ait plus d'hommes du tout est évoquée sans complexe!
Ensuite, le point 57 de cette charte exprime la volonté de valoriser les actions de désobéissance civile, ce qui pose également question.
À mon sens, cette charte devrait être relue dans son ensemble dans le cadre
de ce dossier.