Question sur le recours aux flexi-jobs pour l'accueil extrascolaire

18/01/2024

Question écrite de Madame Stéphanie Cortisse, Députée, à Madame Bénédicte Linard, Ministre de l'Enfance, relative au recours aux flexi-jobs pour l'accueil extrascolaire

Mme Stéphanie Cortisse, Députée.-  Madame la Ministre, lors du dernier conclave budgétaire, le gouvernement fédéral a décidé d'étendre le recours aux flexi-jobs à de nouveaux secteurs dont les gardes d'enfants.

Toutefois, le jour de cette annonce, vous avez déclaré dans la presse que vous n'étiez pas favorable à l'adoption de ce nouveau système en Fédération Wallonie-Bruxelles.

Madame la Ministre, mes questions sont les suivantes :

Cette demande m'a été faite par plusieurs pouvoirs organisateurs et écoles qui estiment qu'il s'agirait là d'une mesure importante permettant de lutter en partie contre la pénurie d'accueillantes extrascolaires, en sachant qu'à l'heure actuelle, ces travailleuses sont bien souvent engagées sous contrat ALE, en article 60 ou sous contrat de bénévolat.

Je vous remercie pour vos réponses.

Mme Bénédicte Linard, Ministre de l'Enfance.-  Madame la Députée, j'ai pris connaissance de l'accord intervenu au sein du Gouvernement fédéral concernant l'extension du dispositif des « flexi-jobs » à de nouveaux secteurs pour cette année 2024. J'ai suivi ce dossier avec attention.

Ce dispositif, prévu par la loi du 16 novembre 2015, permet aux travailleurs occupés au minimum à 4/5ème temps d'exercer un emploi complémentaire auprès d'un autre employeur. Ces prestations supplémentaires sont soumises à des exonérations de cotisation sociale, et à une rémunération minimale spécifique, définie par la loi.

Je rappelle que cette mesure a été initialement adoptée pour répondre aux besoins des secteurs tels que l'HoReCa, le commerce alimentaire ou les salons de coiffure. Ces secteurs se caractérisent par des besoins en main d'œuvre particuliers (en raison de la variabilité saisonnière, la forte rotation et les qualifications limitées notamment).

Les promoteurs des flexi-jobs expliquaient à l'époque qu'il était nécessaire d'assouplir les conditions d'emploi dans ces secteurs pour tenir compte de leurs spécificités. Ils justifiaient également leur proposition par la nécessité d'alléger les coûts reposant sur ces employeurs, dont l'activité requiert une forte intensité de main-d'œuvre.

À dater du 1er janvier 2024, une dizaine de nouveaux secteurs sont automatiquement éligibles aux flexi-jobs. Dans ces secteurs, les partenaires sociaux pourront convenir de ne pas autoriser les flexi-jobs (opt-out), partiellement ou totalement, et de les ré-autoriser (opt-in). L'autorisation ou l'exclusion totale ou partielle des branches d'activités se fait par arrêté royal, à la demande de l'entité fédérée.

Cependant, et pour certaines matières qui leur sont propres, seules les entités fédérées (les Communautés et les Régions) peuvent initier l'autorisation des flexi-jobs dans des secteurs spécifiques, à condition que :

• La demande ait été délibérée au Comité de concertation ;

• Et que la demande ne concerne que la partie du secteur sur laquelle l'entité fédérée démontre qu'il s'agit de services exécutés par ou au nom du Gouvernement dans le cadre de sa mission publique.

Sont notamment explicitement visés :

1. Le secteur flamand de l'aide sociale et des soins de santé dont l'activité principale est la garde d'enfants, ou les employeurs non soumis à la loi du 5 décembre 1968, dont l'activité principale est la garde d'enfants organisée par les pouvoirs publics ;

2. L'enseignement officiel et les membres du personnel subventionné occupés par les établissements d'enseignement libre subventionnés.

On le voit, l'enseignement pourrait être éligible et, par extension, potentiellement les accueils extrascolaires.

Cependant, et comme je le disais ici-même en octobre, la mise en œuvre des flexi-jobs dans le secteur va à contresens des ambitions portées par les récentes réformes dans le secteur de l'accueil de l'enfance. Les milieux d'accueil de la petite enfance et de l'accueil temps libre ont besoin de travailleuses et de travailleurs qualifiés et investis dans la réalisation de leur mission. Le recours à des prestations de travail restreintes, exercées par des travailleurs principalement occupés à d'autres activités, ne peut constituer une vision d'avenir pour l'accueil des enfants.

De plus, fin 2023, la ministre de l'Enseignement, Caroline Désir, se positionnait également sur la question. Elle indiquait qu'elle n'avait aucunement l'intention de proposer que le métier d'enseignant rejoigne la liste des flexi-jobs en Fédération Wallonie-Bruxelles.

En outre, les positions partagées des deux grandes fédérations sectorielles sur le sujet, tel que je l'exposais déjà ici en octobre dernier, montrent que l'introduction de flexi-jobs dans le secteur de l'enfance n'est clairement pas une piste réalisable à court terme.

Je rappelle enfin que dans les métiers de l'éducation et du soin, particulièrement féminins, l'introduction de ce dispositif constituerait un facteur de précarité supplémentaire aggravant les inégalités de genre sur le marché du travail. Il importe de permettre à chacune et chacun d'accéder à un emploi stable, sans devoir multiplier les relations de travail pour atteindre un salaire décent.

Dans un souci de cohérence et surtout de qualité de l'accueil, je n'envisage dès lors pas d'adapter le régime de qualification applicable aux professionnels de l'accueil de l'enfance à la suite de la décision du Gouvernement fédéral.

Je vous remercie pour votre question.