Question sur le développement langagier des enfants en maternelle
Question orale de Mme Stéphanie Cortisse à Mme Caroline Désir, ministre de l'Éducation, sur le projet "Soutenir et observer le langage des enfants en maternelle" (SOLEM).
Mme Stéphanie Cortisse (MR).- Le projet «Soutenir et observer le langage des enfants en maternelle» (SOLEM), développé en novembre 2016 par l'Université de Liège (ULiège) et subventionné par la Fédération Wallonie-Bruxelles, vise à soutenir le développement langagier en maternelle grâce à des outils d'observation et de soutien à l'usage des enseignants en Belgique francophone.
Ce projet part du constat que les effets positifs des contextes éducatifs préscolaires sur le développement langagier des enfants et, donc, sur leur réussite éducative subséquente sont maintenant reconnus. Ces effets positifs s'observent particulièrement chez des enfants provenant de milieux vulnérables sur le plan socioéconomique.
En effet, à l'école maternelle, les enfants font quotidiennement l'expérience d'interactions riches et diversifiées avec les enseignants; ces interactions sont susceptibles d'étayer leur langage.
Ce projet vise à répondre au problème du sous-développement de l'orthophonie «préventive» dans les classes maternelles en Fédération Wallonie-Bruxelles, ainsi qu'au manque d'outils et de connaissances dans le chef des instituteurs pour observer le développement langagier des enfants.
L'outil SOLEM a été conçu à partir des objectifs suivants, issus de quatre groupes nominaux composés d'enseignants, d'agents psycho-médico-sociaux (PMS) et de directeurs d'écoles: accorder de l'importance aux aspects moins formels du langage; adopter une démarche en arborescence adaptée à chaque enfant et menant à des pistes d'action adaptées; identifier les enfants qui ont besoin d'un soutien spécifique sur le plan du développement langagier; observer leur communication pour y ajuster le soutien offert.
Un prototype de cet outil a été développé et expérimenté dans dix classes-pilotes afin d'en valider la forme et le contenu.
Madame la Ministre, quels sont les retours de cette expérience pilote? Cette méthode est-elle actuellement appliquée dans les écoles de l'enseignement ordinaire ou spécialisé?
Envisagez-vous une généralisation de cette pratique pédagogique dans l'enseignement maternel, tous réseaux et tous types d'enseignement confondus? Si une généralisation n'est pas envisageable, pensez-vous qu'il faille en faire la promotion auprès des enseignants? Quels seraient vos moyens d'action?
Mme Caroline Désir, ministre de l'Éducation.- Le projet SOLEM est issu d'une recherche qui s'est déroulée entre 2015 et 2018 dans l'enseignement officiel organisé par la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Il a été conçu en concertation avec des enseignants de maternelle et des agents de centres PMS, afin qu'il s'adapte le plus possible au vécu en classe. Il a pour objectif de guider l'enseignant de deuxième année maternelle avec l'accompagnement d'un logopède afin de déterminer les besoins de soutien langagier pour chaque enfant de la classe.
Deux années ont été nécessaires à l'élaboration de l'outil; une troisième année s'est centrée sur la comparaison de différents modèles d'implémentation.
Au total, 25 enseignants et 248 enfants ont participé à la conception du projet et à la validation de l'outil pendant les deux premières années, puis 41 enseignants ont été accompagnés pour les kits d'implémentation. Leurs classes comptaient entre 10 et 33 enfants.
Le contexte éducatif en maternelle est un milieu privilégié pour promouvoir le développement des habiletés langagières des jeunes enfants. En effet, soutenir le langage et la communication des enfants en maternelle est essentiel pour favoriser leurs apprentissages et, en conséquence, leur réussite éducative. Or, les enseignants ne se sentent pas toujours outillés pour le faire correctement.
Le projet SOLEM fournit des repères du développement communicationnel et langagier et permet de dresser un portrait complet du langage et de la communication de chaque enfant de deuxième maternelle.
Il propose ensuite des stratégies permettant de mieux les soutenir. Ces stratégies s'adressent à tous les enfants, plus particulièrement aux enfants plus vulnérables sur le plan du langage et/ou de la communication.
Lors de la phase d'élaboration de l'outil, les entretiens individuels réalisés avec les enseignants qui ont testé l'outil SOLEM dans leur classe ont mis en évidence qu'une réflexion devait être menée pour l'implémentation durable de ce projet.
À cette fin, durant cette année scolaire 2019-2020, une formation a été organisée à l'attention des logopèdes travaillant dans les centres PMS afin qu'ils développent les compétences issues de l'accompagnement des enseignants chargés d'implémenter l'outil SOLEM dans leur classe. Quelque 148 logopèdes issus des différents pouvoirs organisateurs se sont inscrits, soit la quasi-totalité des logopèdes qui travaillent dans les centres PMS.
Cette formation était initialement prévue le 28 mars 2020. En raison de la crise sanitaire, elle a été repoussée à octobre 2020. Néanmoins, un groupe de 38 logopèdes a été recruté pour tester dès le 20 juin des capsules web qui pourraient être diffusées plus largement pour promouvoir l'outil.
Mme Stéphanie Cortisse (MR).- Madame la Ministre, je vous remercie pour vos réponses précises.
L'avis n° 3 du Groupe central du Pacte pour un enseignement d'excellence prévoit, dans son axe stratégique 4, que «les interventions qui visent, dès l'enseignement maternel, à réduire les inégalités constatées dans les acquis langagiers en fonction de l'origine sociale et culturelle doivent être privilégiées.» Le projet SOLEM s'inscrit clairement dans ce cadre, tout comme dans celui du développement de la promotion de l'innovation pédagogique sur le modèle de l'éducation fondée sur l'épreuve, également prévu par le Pacte.
Je suis ravie d'apprendre que vous choisissiez cette voie et que pratiquement tous les logopèdes qui font partie des centres PMS participent à cette formation. Je ne manquerai pas de suivre l'évolution de ce beau projet !