Question sur le traitement des enseignants rémunérés partiellement pour une journée prestée à temps plein

05/03/2024

Question orale de Mme Stéphanie Cortisse, Députée, à Mme Caroline Désir, Ministre de l'Éducation, à propos du traitement des enseignants qui ont presté une journée à temps plein, mais ne sont rémunérés que partiellement

Mme Stéphanie Cortisse (MR). – Madame la Ministre, plusieurs pouvoirs organisateurs communaux m'ont fait part d'une problématique importante. Des enseignants qui effectuent une journée de remplacement à temps plein dans leur pouvoir organisateur – par exemple, pour remplacer un titulaire en formation ou en incapacité de travail – ne sont rémunérés que partiellement parce qu'ils sont déjà désignés à temps partiel au sein du même pouvoir organisateur ou d'un autre.

Je vous cite un premier exemple. Une institutrice effectue un remplacement à temps plein un jeudi dans le pouvoir organisateur A. Elle preste six périodes. Or, cette semaine-là, elle était désignée à mi-temps dans un pouvoir organisateur B. Elle prestait ce mi-temps le lundi matin (deux périodes), le mardi (quatre périodes) et le vendredi (six périodes). Elle était donc libre le jeudi. Au cours de la semaine, elle a donc presté douze périodes pour le pouvoir organisateur B et six périodes pour le pouvoir organisateur A, soit 18 périodes au total. Or, le jeudi, elle est considérée comme à mi-temps (12/24e), bien qu'ayant presté toute la journée. Elle est ainsi rémunérée à 2,4/24e au lieu de 6/24e. Pour l'ensemble de la semaine, elle a perçu un traitement pour 14,4/24e au lieu de 18/24e.

Prenons un autre exemple. Une enseignante est nommée à mi-temps au sein d'un pouvoir organisateur et preste ses 12/24e les lundi et mardi. Elle tombe malade et rentre un certificat médical pour deux jours, qui sont décomptés de son octroi de congé maladie. Elle n'a pas intérêt à rentrer un certificat médical pour toute la semaine, puisqu'elle perdrait alors trois jours de travail. Le pouvoir organisateur lui trouve une remplaçante temporaire, mais celle-ci ne peut réglementairement pas être désignée pour seulement deux jours. Comme le logiciel de calcul des salaires de la Fédération Wallonie-Bruxelles est basé sur un régime de travail hebdomadaire de cinq jours, la remplaçante est considérée comme ayant travaillé 2/5e d'un mi-temps. Par conséquent, elle est payée pour 4,8 périodes, alors qu'elle en a presté douze!

Je me suis renseignée auprès de la Direction générale des personnels de l'enseignement (DGPE). Il ne s'agit pas uniquement d'un problème lié au logiciel de calcul des salaires. Le problème découle aussi du fait que le statut pécuniaire dépend d'un calcul du traitement basé sur la période de prestations et la charge prestée, sans tenir compte du nombre de périodes effectivement prestées par le membre du personnel.

Pour prendre un dernier exemple, un membre du personnel engagé pour une semaine et effectuant ses prestations le lundi (trois heures) et le vendredi (trois heures) sera mieux rémunéré qu'un membre du personnel engagé pour deux jours et effectuant ses prestations le lundi (trois heures) et le mardi (trois heures), alors qu'ils ont presté le même nombre d'heures. Ceci pose une réelle question de discrimination.

Pour pouvoir établir un calcul à la prestation, une profonde modification du statut pécuniaire est nécessaire. De plus, l'administration devrait connaître les prestations réelles effectuées par les membres du personnel dont elle assure la gestion pécuniaire au sein de chaque établissement scolaire. Or, à ce jour, ces prestations ne sont pas connues de l'administration et aucune application ne permet aux écoles et à l'administration de communiquer à ce sujet.

Cette situation est-elle bien connue de vos services? Quelles sont les solutions envisagées pour remédier à cette situation discriminatoire? Une réforme du statut pécuniaire des enseignants est-elle envisageable? Comment le chantier relatif à la future plateforme de paie informatisée des enseignants, Cepage, progresse-t-il? Les prestations réelles des enseignants pourront-elles y être encodées?

Mme Caroline Désir, Ministre de l'Éducation. – Cette situation est en effet bien connue de mes services et relève de l'application du statut pécuniaire du personnel enseignant. Les modalités de calcul du traitement des prestations effectuées par les membres du personnel à titre temporaire sont précisées par l'article 7, § 1er, de l'arrêté royal n° 63 du 20 juillet 1982 modifiant les dispositions des statuts pécuniaires applicables au personnel enseignant et assimilé de l'enseignement de plein exercice et de l'enseignement de promotion sociale ou à horaire réduit de l'arrêté royal du 15 avril 1958 portant statut pécuniaire du personnel enseignant, scientifique et assimilé du ministère de l'Instruction publique.

À ce jour, aucune demande visant un tel degré de suivi individualisé de prestation des enseignants entre différents établissements et pouvoirs organisateurs et remettant en cause ce mécanisme ne m'a été présentée. Par contre, je voudrais vous rappeler que Cepage a pour objectif de créer d'ici quatre ou cinq ans une nouvelle plateforme de gestion de la carrière administrative et pécuniaire du personnel de l'enseignement. Une étude préalable à la création de cette plateforme vient d'être terminée. Cette étude a pour but d'analyser l'existant, les pratiques de paie, de faire une véritable comparaison avec ce qui est fait ailleurs (benchmarking), d'identifier les contraintes ou les risques et d'établir les recommandations qui permettront d'implémenter ce projet.

L'étude a été conjointement menée par l'Entreprise publique des technologies nouvelles de l'information et de la communication (ETNIC) au niveau informatique et par l'Administration générale de l'enseignement (AGE) au niveau des métiers. À terme, ces deux organisations seront aidées par des intervenants externes dont la gouvernance sera déterminée après publication du rapport final. Il est indéniable que Cepage entraînera la révision tant des processus métier que des outils informatiques connexes dans une optique de simplification et d'harmonisation administrative et procédurale. Je confirme que les travaux relatifs à la simplification des statuts lors de création de Cepage comporteront bien une étude du statut pécuniaire qui permettra l'examen de l'opportunité et de la faisabilité de ce projet.

Mme Stéphanie Cortisse (MR). – Madame la Ministre, vous dites que la situation est bien connue par vos services mais que vous n'avez aucun retour de la part des personnes concernées. Pourtant, un pouvoir organisateur m'a interpellée, car il rencontre des problèmes administratifs depuis près de quinze ans. Je vous transférerai les courriels. L'administration se dit impuissante. Il s'agit là d'un véritable problème puisque des enseignants prestent des heures et, pour des raisons obscures liées à leur statut, ne sont pas payés adéquatement. C'est tout à fait inéquitable. C'est même étonnant que les enseignants ou les syndicats ne se soient pas manifestés plus tôt. J'espère que la création de Cepage permettra de résoudre ce problème.