Résultats de l'enquête internationale TALIS 2024

Question orale de Mme Stéphanie Cortisse, Députée, à Mme Valérie Glatigny, Ministre de l'Éducation, à propos des résultats de l'enquête internationale TALIS 2024
Mme Stéphanie Cortisse (MR). – Madame la Ministre, le 7 octobre dernier, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a publié les résultats de la Teaching and Learning International Survey (TALIS) de 2024. Centrée sur les environnements d'enseignement et d'apprentissage, cette enquête donne la parole aux enseignants et aux directions. C'est la deuxième fois que la Fédération Wallonie-Bruxelles y prend part pour le premier degré de l'enseignement secondaire – la première enquête ayant eu lieu en 2018 – et c'est la première fois qu'elle y participe pour l'enseignement fondamental.
Concernant la gestion de classe, bien que le climat soit perçu comme légèrement plus bruyant ou remuant qu'ailleurs, les enseignants de la Fédération Wallonie-Bruxelles sont nombreux à déclarer fréquemment mettre en œuvre des stratégies reconnues comme efficaces et à exprimer un sentiment d'efficacité élevé eu égard à la gestion des comportements des élèves.
En ce qui concerne les pratiques générales d'enseignement, les dimensions liées à la clarté de l'enseignement et au soutien à la consolidation des apprentissages apparaissent bien ancrées dans les pratiques déclarées. En revanche, la dimension faisant appel à l'activation cognitive est moins présente, situant les enseignants de la Fédération Wallonie-Bruxelles significativement en dessous de la moyenne des pays de l'OCDE. Singulièrement, le point «Je donne des tâches qui demandent aux élèves d'exercer leur esprit critique» et qui mesure une pratique d'activation cognitive mérite une attention particulière, car moins de la moitié des enseignants déclarent proposer régulièrement des tâches de ce type en Fédération Wallonie-Bruxelles.
En ce qui concerne le développement de compétences socio-émotionnelles chez les élèves, les résultats montrent que les enseignants de l'enseignement primaire semblent plus enclins que leurs collègues du premier degré de l'enseignement secondaire à intégrer de telles pratiques, et qu'ils se sentent globalement plus à l'aise avec cette thématique.
La dernière dimension analysée concerne les pratiques d'évaluation et de différenciation. L'analyse met en lumière plusieurs constats. Tout d'abord, les enseignants déclarent fréquemment prévoir des évaluations permettant de faire un bilan des acquis, fournir des retours aux élèves, ou encore formuler différemment leurs propres explications en cas d'incompréhension des élèves. En revanche, ils sont nettement moins nombreux à indiquer qu'ils mettent en œuvre des pratiques d'évaluation formative, et encore moins nombreux à impliquer les élèves dans le processus évaluatif. Concernant ce dernier point, les fréquences observées en Fédération Wallonie-Bruxelles se situent significativement en dessous de la moyenne de l'OCDE. Les pratiques de différenciation consistant à laisser plus de temps aux élèves ou à varier les supports sont également peu fréquentes au premier degré de l'enseignement secondaire, mais occupent un peu plus de place dans l'enseignement primaire, tout comme le co-enseignement.
Madame la Ministre, avez-vous pris connaissance des résultats de cette enquête? Quelle lecture en faites-vous? Quelles mesures sont-elles sur la table afin d'y répondre?
Mme Valérie Glatigny, Ministre de l'Éducation. – J'ai bien pris connaissance des résultats de l'enquête TALIS 2024. Il s'agit d'une enquête salutaire, car elle donne directement la parole à nos enseignants et directions, nous offrant ainsi un aperçu de leurs ressentis et nous permettant de comprendre comment ils vivent leur métier et quelles sont les pratiques qu'ils adoptent au quotidien.
C'est la deuxième participation de la Fédération Wallonie-Bruxelles à cette enquête internationale depuis 2018, mais c'est la première fois que les instituteurs et institutrices de l'enseignement primaire sont conviés. Pour cette édition, le taux de participation a été particulièrement élevé – près de 90 % des écoles –, ce qui rend les résultats plutôt solides et représentatifs.
À la lecture de cette enquête, j'observe avant toute chose un attachement très fort des enseignants à leur métier. Ils aiment enseigner et continuent à s'investir malgré les contraintes multiples. C'est un message fort qu'il convient de mettre en avant. Ainsi, le taux d'enseignants exprimant leur intention de quitter l'enseignement dans les cinq prochaines années est moitié moindre que la moyenne des pays de l'OCDE: 9,5 % contre 20 %. Le gouvernement continuera à travailler sur ce point spécifique, parce que nous ne pouvons pas nous satisfaire de ces chiffres et que nous devons faire en sorte que ces primo-enseignants poursuivent leur carrière au sein de notre système éducatif.
Ainsi, l'instauration du contrat à durée indéterminée pour enseignant (CDIE) dès 2027 est une première réponse pour les nouveaux enseignants formés en quatre ans. Cette mesure poursuit un objectif clair: une charge horaire stable à 100 % en début de carrière avec un allègement de deux périodes face classe la première année pour se former, préparer ses cours et participer à un mentorat. La mesure inclut aussi une revalorisation salariale de 5 % pour les nouveaux enseignants formés en quatre ans dans le cadre de la réforme de la formation initiale des enseignants (RFIE).
En matière de gestion de classe, l'enquête révèle néanmoins que la gestion de la discipline rogne davantage le temps d'enseignement qu'en 2018, et ce, comme dans la plupart des pays de l'OCDE. Pour lever toute ambiguïté, je tiens à préciser que le temps d'enseignement doit primer en classe. C'est une des raisons pour lesquelles nous avions aussi supprimé l'usage récréatif du smartphone dans les classes.
La relation élève-enseignant-parent est essentielle pour un parcours scolaire réussi et c'est cette relation fondamentale entre l'école et la famille qui a considérablement évolué au fil du temps. Deux problématiques sont aujourd'hui pointées par les acteurs de terrain. D'un côté, il y a les parents qui seraient, selon les acteurs de terrain, démissionnaires et ne s'intéresseraient plus – ou moins – à l'école. D'un autre côté, il y a des parents qui seraient plutôt dans une posture d'ingérence, notamment par rapport au projet pédagogique et au travail des enseignants. Pour moi, il est essentiel de proposer un véritable contrat entre les écoles, les parents et les élèves. Ce dernier sera très prochainement soumis au gouvernement. Il reste que les enseignants se disent aussi confiants dans leur capacité à maintenir un cadre de travail efficace – ce qui traduit un véritable savoir-faire professionnel – et je les en remercie chaleureusement.
Selon l'enquête, les enseignants de la Fédération Wallonie-Bruxelles déclarent aussi un équilibre vie privée et vie professionnelle meilleur que dans les autres pays de l'OCDE. Je m'en réjouis, car cela contribue sans aucun doute au bien-être des enseignants. Cela se reflète notamment dans la charge de travail hebdomadaire déclarée qui est de 34 heures au degré inférieur de l'enseignement secondaire et de 38 heures dans l'enseignement primaire. Ces chiffres ne sont bien entendu que des moyennes et il convient donc bien entendu de les manipuler avec précaution.
Plus encore, les résultats sur les ressources personnelles et professionnelles sont encourageants et je pointerai l'investissement de nos professeurs dans la didactique et les connaissances disciplinaires, leur perception positive de la formation professionnelle continue (FPC), leur reconnaissance du soutien des directions aux équipes éducatives, ou encore, l'importance donnée au travail collaboratif.
Enfin, si la grande majorité des enseignants estiment que la direction de l'école est soutenante et qu'elle constitue une ressource, il est important de reconnaître le travail de ces directions. Pour cette raison, les directions verront une augmentation de leur traitement pour maintenir la tension de 25 % avec le traitement des membres du personnel enseignant. Par cette mesure, nous allons enfin reconnaître pleinement les responsabilités de nos directions.
Je ne serai pas plus longue, car ces premiers résultats TALIS 2024 confirment que nous sommes sur la bonne voie.
Mme Stéphanie Cortisse (MR). – L'enquête donne la parole aux acteurs de terrain, ce qui est essentiel. Le taux de participation élevé la rend représentative de la situation. De nombreuses mesures sont déjà prévues pour remédier à une grande partie des problématiques soulevées par le rapport et je m'en réjouis. C'est sans doute pour cela qu'aucun autre collègue ne vous interroge sur le sujet: l'enquête met en évidence des points positifs que certains n'ont pas envie de souligner. Je vous remercie, Madame la Ministre, car il est important de reconnaître les avancées réalisées.