Question sur la Commission des Seniors

24/05/2022

Question orale de Mme Stéphanie Cortisse, Députée (MR), à Mme Bénédicte Linard, Ministre en charge de l'Éducation Permanente, à propos de l'évaluation du décret du 26 mai 2011 instaurant la Commission des seniors de la Communauté française

Mme Stéphanie Cortisse (MR). - Madame la Ministre, je vous ai fait part à plusieurs reprises de ma volonté d'adopter une stratégie claire et transversale pour soutenir et favoriser la participation et l'inclusion des seniors dans les politiques menées par la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Certes, la plupart des compétences de notre entité dans le domaine de « l'aide aux personnes », et en particulier « la politique du troisième âge », ont été transférées en 1992 à la Région wallonne et à la Commission communautaire française (COCOF). Toutefois, ce transfert de compétences n'empêche nullement la Fédération Wallonie-Bruxelles d'inclure les seniors dans l'ensemble de ses politiques.

Par le décret du 26 mai 2011 instaurant la Commission des Seniors de la Communauté française, la Fédération Wallonie-Bruxelles a créé un nouvel organe ayant pour mission première «d'émettre des avis, soit d'initiative, soit à la demande du Gouvernement ou de l'un de ses membres ou du Parlement, notamment dans le cadre du processus d'adoption des projets et propositions de décret, sur toutes les matières relevant des compétences de la Communauté française qui présentent un lien avec les intérêts des seniors et leur participation active à la société».

Le Gouvernement et le Parlement n'avaient encore jamais usé de cette faculté jusqu'à ce que vous et moi nous y intéressions.

En 2020, vous avez chargé l'Observatoire des politiques culturelles (OPC) de mener une analyse approfondie de ce décret. Lors de la réunion du 1er juin 2021 de notre commission, vous avez présenté les conclusions de cette évaluation décrétale et précisé que «l'OPC confirme la pertinence d'une telle Commission, vu le contexte démographique belge, et estime nécessaire de reconsidérer les moyens octroyés à la Commission au regard des missions décrites dans le décret, ou de reconsidérer ses missions au regard des moyens octroyés». Vous avez ajouté que «l'OPC insiste par ailleurs sur la centralité de sa première mission - émettre des avis, d'initiative ou à la demande du gouvernement ou du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles - et souligne l'opportunité de décliner en objectifs les missions formulées dans le décret».

Vous avez également annoncé votre volonté d'apporter des modifications au décret en tenant compte des observations de l'OPC et d'examiner, dans ce cadre, la manière dont la Flandre envisage la participation des seniors à la chose publique.

La Flandre a effectivement accompli de belles avancées dans l'inclusion des seniors grâce à un décret de 2004, actualisé en 2012, qui prévoit l'élaboration, tous les cinq ans, par le gouvernement flamand d'un plan de politique à l'égard des personnes âgées, la désignation d'un ministre coordinateur pour cette matière et la création du conseil flamand des personnes âgées, le Vlaamse Ouderenraad, un organe semblable à la Commission des seniors de notre Fédération. Les subventions octroyées au Vlaamse Ouderenraad s'élèvent à 584 000 euros pour cinq ans. Elles sont près de six fois supérieures à ce que la Fédération Wallonie-Bruxelles octroie à la Commission des seniors, dont le subventionnement annuel est de 20 000 euros par an, soit 100 000 euros sur cinq ans. Toutefois, le plan d'action du gouvernement flamand est budgétairement neutre. En d'autres termes, il n'y a pas de budget séparé pour la mise en œuvre du plan, de nombreuses actions étant incluses dans le budget récurrent de chaque domaine politique. J'ai obtenu ces informations en interrogeant l'ancien ministre Wouter Beke qui était aussi compétent pour les seniors. Outre son rôle consultatif, le Vlaamse Ouderenraad contribue également à la mise en œuvre du plan gouvernemental.

Le paysage institutionnel du sud du pays ne devrait pas être une entrave à l'élaboration d'un tel dispositif en Fédération Wallonie-Bruxelles, tout en menant une concertation avec les Régions.

Des avancées visant la révision du décret du 26 mai 2011 ont-elles eu lieu depuis nos derniers échanges sur le sujet? Dans l'affirmative, quelles sont-elles? Vous êtes-vous penchée sur le décret flamand précité? Qu'en pensez-vous? Envisagez-vous de légiférer sur la création d'un plan transversal et pluriannuel d'objectifs stratégiques et de mesures que le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles s'engagerait à adopter et à mettre en œuvre durant chaque législature, en collaboration avec la Commission des seniors? Enfin, envisagez-vous une concertation entre les différents niveaux de pouvoir en Belgique francophone pour une politique plus efficace et transversale destinée aux seniors?

Mme Bénédicte Linard, vice-présidente du gouvernement et Ministre de l'Enfance, de la Santé, de la Culture, des Médias et des Droits des femmes. - Lorsqu'en juin 2020 me fut posée la question du prolongement de la reconnaissance de la Coordination des associations de seniors comme Commission des seniors de la Communauté française, il m'est apparu nécessaire, à la lecture de l'analyse de la demande effectuée par mon administration, de permettre à cette Commission d'enfin remplir sa fonction première, à savoir celle d'être consultée sur les politiques menées par la Fédération Wallonie-Bruxelles et qui concernent les seniors. En effet, à ce moment, jamais, depuis l'instauration de cette Commission, le gouvernement ou le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles n'avait sollicité son avis.

J'ai donc pris l'initiative, afin de la faire connaître aux parlementaires, de transmettre son rapport d'activités annuel. J'ai également envoyé un courrier à mes homologues du gouvernement qui les informait des missions de cette instance, qui concernent l'ensemble des compétences de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Je suis la première ministre à avoir sollicité directement un avis auprès de cette Commission, en l'occurrence sur le Plan "Éducation aux médias". Depuis, je lui ai demandé un avis relatif à l'enquête sur l'âgisme menée par Amnesty. Je sais qu'elle souhaite organiser, au sein de notre Parlement, un colloque sur cette thématique. J'ai également sollicité son expertise sur le projet de déclaration ministérielle qui sera adoptée à l'issue de la Conférence ministérielle régionale sur le vieillissement qui se tiendra à Rome, du 15 au 17 juin 2022.

À la suite de l'analyse approfondie menée par l'OPC, en concertation avec l'opérateur et le Service général de l'éducation permanente et de la jeunesse, le décret du 26 mai 2011 a été modifié par une disposition figurant dans le décret-programme portant diverses dispositions accompagnant le budget 2022. Par souci de clarté et de sécurité juridique, l'article 32 de ce décret-programme vise à préciser, dans le décret du 26 mai 2011, que l'exigence de satisfaire les missions mentionnées à l'article 3 devait être évaluée en proportion du montant des subventions accordées à l'association agréée. En effet, ces missions couvrent toutes les compétences de la Communauté française et sont potentiellement très larges. Compte tenu des moyens qui lui sont accordés, il est légitime que l'association agréée se fixe des priorités.

Tel est notamment l'objet du plan d'action que, conformément à l'article 4 du décret, l'association doit établir. Celui de 2021-2023, approuvé par le gouvernement, a été communiqué au Parlement le 24 septembre 2021. Dans ce plan d'action, la Commission indique qu'elle sollicitera une reconnaissance, et donc des moyens, auprès des Régions wallonne et bruxelloise. Une telle reconnaissance aurait du sens vu le nombre de compétences relatives aux seniors et dépendant des Régions. J'attends le résultat des démarches entreprises par la Commission afin de mesurer l'intérêt des autres niveaux de pouvoir pour l'adoption d'un plan «Seniors» commun et ambitieux. Toutefois, considérant que la plupart des compétences relatives aux seniors sont régionales, il me semble que l'impulsion pour un tel projet doit venir de ce niveau de pouvoir. Le décret encourageant une politique flamande inclusive à l'égard des personnes âgées et la participation à la politique des personnes âgées est d'ailleurs une initiative du ministre du Bien-Être, de la Santé publique et de la Famille et non du ministre de la Culture.

Je voudrais enfin attirer votre attention sur le fait que la Fédération Wallonie-Bruxelles, grâce à ce précieux et unique décret relatif à l'éducation permanente qui soutient et renforce le rôle politique de la société civile, reconnaît plusieurs associations de seniors. Ces associations, qui bénéficient d'un financement, interpellent directement les élus et les gouvernements sur les combats qu'elles mènent pour la défense et le développement de leurs droits culturels, économiques, sociaux et politiques.

Mme Stéphanie Cortisse (MR). - Je suis contente d'avoir pu participer au lancement de cette Commission des seniors. Elle travaillait déjà, mais son rôle premier de rendre des avis au gouvernement et au Parlement n'avait encore jamais pu être rempli.

Je note qu'elle va solliciter sa reconnaissance auprès des Régions. J'espère, Madame la Ministre, que vous pourrez prendre contact avec les ministres compétents pour la faciliter.

Je sais que les paysages sont très différents en Flandre et en Wallonie. Cependant, si la politique du troisième âge a été transférée aux Régions, on ne considère les seniors qu'à travers le prisme de la santé. C'est à la Fédération Wallonie-Bruxelles que nous traitons les matières qui concernent davantage les personnes, par exemple la culture, le sport ou les médias.

Sans réforme de l'État, il faut un plan transversal concernant toutes les entités fédérées francophones et il me paraît opportun de disposer un ministre des Seniors, comme nous comptons un ministre de la Jeunesse ou de l'Enfance.