Question sur les cours de FLA et la pénurie d'enseignants

06/10/2020

Question de Mme Stéphanie Cortisse à Mme Caroline Désir, Ministre de l'Éducation, sur le dispositif "Français Langue d'Apprentissage" (FLA) et la pénurie d'instituteurs.

Mme Stéphanie Cortisse (MR).- Le 8 janvier dernier, la RTBF publiait un article sur son site intitulé «Province de Liège: les écoles en pénurie d'instits dans l'enseignement primaire». À cette époque, les directeurs d'école de la province de Liège constataient une difficulté grandissante pour trouver des instituteurs. Chaque année, les directions font face à ce type de difficultés, mais celles rencontrées l'année passée ont eu lieu bien plus tôt dans l'année scolaire que durant les années précédentes. La raison, selon ces directeurs, était principalement liée à la mise en place du dispositif FLA (français langue d'apprentissage), qui a créé plus d'un millier d'emplois dans l'enseignement en Fédération Wallonie-Bruxelles, mais qui a par conséquent vidé les réserves d'instituteurs pour effectuer des remplacements.

Plusieurs directeurs m'ont récemment contactée en dressant un constat similaire en ce début d'année scolaire. Ces derniers évoquent même des difficultés de pénurie d'enseignants précisément pour donner les périodes de FLA.

Or le décret du 11 avril 2014 réglementant les titres et fonctions dans l'enseignement fondamental et secondaire organisé et subventionné par la Communauté française (décret «Titres et fonctions») les contraint à se tourner uniquement vers des enseignants, quelle que soit la discipline enseignée.

Compte tenu de la pénurie d'enseignants, les directeurs regrettent de ne pas pouvoir demander, par exemple, à des logopèdes d'enseigner le FLA auxquelles leurs élèves ont pourtant droit.

Madame la Ministre, avez-vous également reçu des témoignages en ce sens? Le décret «Titres et fonctions» prévoit-il un mécanisme de dérogation pour dispenser les périodes de FLA? Ne pourriez-vous pas autoriser les directeurs d'école à se tourner vers des logopèdes, ou d'autres professionnels du langage, qui bénéficient d'une formation et de compétences qui correspondent au profil recherché pour enseigner le FLA?

Mme Caroline Désir, Ministre de l'Éducation.- La Direction générale de l'enseignement obligatoire a reçu des témoignages sur la pénurie d'enseignants, mais pas suffisamment pour objectiver à ce stade une situation globale.

Le décret du 7 février 2019 visant à l'accueil, la scolarisation et l'accompagnement des élèves qui ne maîtrisent pas la langue dans l'enseignement organisé ou subventionné par la Communauté française (décret «FLA-DASPA») dispose que le service général de l'inspection réalise une mission durant le premier trimestre de l'année scolaire 2020-2021 sur l'utilisation des périodes, le profil des enseignants engagés, la prise en charge des élèves et les difficultés déclarées ou observées lors du développement du dispositif. Ce travail, réalisé dans les prochains mois, permettra d'avoir un meilleur état de la situation dans les écoles.

Le décret du 7 février 2019 a effectivement prévu des dispositions spécifiques permettant de déroger à la priorisation des titres requis et suffisants pour les membres du personnel pouvant se prévaloir de compétences particulières. Celles-ci ne peuvent cependant être activées que dans la mesure où les candidats ont bien suivi une formation certifiée listée par l'arrêté du gouvernement de la Communauté française du 17 juillet 2019 portant exécution de l'article 2, 2° et 3°, et des articles 9, 11, 18 et 19 du décret du 7 février 2019.

Par ailleurs, l'article 5 du décret «Titres et fonctions» dispose que la fonction d'enseignant, d'instituteur primaire peut s'exercer dans l'enseignement maternel ordinaire, et inversement dans le cadre de l'application du décret «FLA-DASPA». Le régime du titre pour chaque fonction reste cependant identique.

Pour les logopèdes, leurs titres, soit de bachelier, soit de master, sont considérés comme étant des titres suffisants, s'ils ont un titre de capacité. En application du décret du 17 juillet 2020 portant des mesures en vue de lutter contre la pénurie, ils peuvent même être mis sur un pied d'égalité avec des candidats ayant un titre requis, mais uniquement en cas de primo recrutement. En l'absence d'une composante pédagogique, ces mêmes logopèdes seront alors considérées comme possédant un titre de pénurie.

Enfin, le décret du 17 juillet 2020 a apporté des modifications substantielles au décret«Titres et fonctions». Ainsi, depuis le 1er septembre dernier, si un pouvoir organisateur démontre, par un procès-verbal de carence, qu'il n'y a pas de candidat ayant de titre requis, suffisant ou de pénurie, il est autorisé à engager un titre de pénurie non listé.

Mme Stéphanie Cortisse (MR).- Madame la Ministre, ce sujet étant assez technique, je me réjouis d'obtenir le compte-rendu afin d'y voir plus clair et d'apporter cette réponse aux directeurs qui m'ont interpellée sur cette question.

La lutte contre la pénurie d'enseignants que nous connaissons depuis de nombreuses années fait partie des objectifs prioritaires du gouvernement.

Le 16 juillet dernier, nous avons fait un premier pas dans la bonne direction en votant un décret portant des mesures en vue de lutter contre la pénurie par lequel nous avons adopté une série de points, que vous appelez vous-même «mesures à court terme».

Donc, le travail n'est pas terminé. Et une révision en profondeur du décret «Titres et fonctions» est indispensable. D'ailleurs, le gouvernement s'y engage dans la Déclaration de politique communautaire.

Nous aurons l'occasion d'en débattre lors du groupe de travail que nous allons prochainement créer.

Toutefois, il me paraissait nécessaire de ne pas attendre ces travaux pour vous relayer les propositions émanant des acteurs de terrain, comme ici la possibilité d'engager des logopèdes pour donner des cours de FLA. Je comprends que c'est possible dans certains cas.

Nous devons nous assurer que tous les cours, en ce compris ceux de FLA, puissent être donnés, sinon à quoi bon légiférer pour les créer ?